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Web3 et Recherche Scientifique, Interview de Kamil Ramdani – Nosty

Afin de poursuivre notre exploration de la Science Décentralisée, l’équipe de RésolvingPharma est heureuse de vous proposer cette interview de Kamil Ramdani, l’un des co-fondateurs de Nosty, une plateforme utilisant les outils du Web3 afin de financer des projets de recherche biomédicale et dont le lancement officiel aura lieu dans les prochains mois. Propos recueillis par Alexandre Demailly.

Pouvez-vous nous présenter Nosty ?

Bien sûr ! Nosty, est une plateforme de financement participatif qui met en relation des chercheurs ou des entreprises de biotechnologie avec des investisseurs pour financer des projets de recherche dans le domaine de la santé. Nous utilisons la technologie blockchain pour rendre les transactions transparentes et sécurisées. Notre projet s’intéresse à deux verticales différentes : d’une part, nous aidons les chercheurs à trouver des fonds pour leurs projets innovants, et nous permettons aux investisseurs de soutenir des causes importantes, en échange de quoi, ils reçoivent une part de la propriété intellectuelle générée par le projet de recherche. D’autre part, nous permettons également aux sociétés de biotech et de medtech de lever des fonds pour un de leurs projets de recherche en échange de royalties à la commercialisation du produit issu du programme de recherche. Nous pensons que nous pouvons contribuer à transformer la manière dont est financé le développement de nouveaux médicaments.

Quelle est la technologie utilisée par le projet ? En quoi son utilisation est-elle inédite ? 

Nous utilisons la blockchain Tezos pour créer un écosystème décentralisé et transparent, spécialement adapté à la recherche scientifique. C’est une approche inédite qui combine les avantages de la blockchain aux besoins des chercheurs pour faciliter la collaboration et le financement.

Nous utilisons les Science-Tokens. Il s’agit d’un jeton non fongible qui représente la propriété intellectuelle potentiellement générée par un projet scientifique.

En d’autres termes, le Science-Token permet de tokéniser (NDLR : basée sur la blockchain, la tokenisation permet de valoriser et de matérialiser des actifs réels dans le monde digital. En inscrivant un actif et ses droits directement sur un token, la tokenisation facilite la gestion et l’échange avec un pair, de manière instantanée et sécurisée) la propriété intellectuelle d’un projet de recherche scientifique, afin de faciliter sa gestion, son transfert et son financement. Pour chaque projet de recherche financé sur la plateforme, une collection de Science-Tokens est émise.  Le détenteur d’un Science-Token a ainsi des droits financiers sur la propriété intellectuelle du projet lorsque survient un événement de liquidité (contrat de licencing, création d’une spin-off, cession du brevet, etc) mais aussi le droit de participer à différentes masterclass offertes par l’équipe de recherche Cette technologie est particulièrement intéressante pour les chercheurs et les institutions de recherche, car elle offre une nouvelle façon de financer et de valoriser leur travail.

Nous développons également un autre produit qui sera également commercialisé sur la plateforme Nosty : les Royalties-Tokens. Ils fonctionnent d’une manière proche mais s’adressent à des projets de recherche plus matures, portés par des entreprises de biotech ou de Medtech. Les détenteurs des Royalties Tokens d’un projet obtiennent des royalties lors de la commercialisation du produit.

En quoi ce projet peut favoriser le financement de projets de recherche innovants ?

Grâce à Nosty, les projets de recherche innovants pourront être financés plus facilement, en donnant à chacun la possibilité de soutenir directement les projets sans passer par des intermédiaires. Cela rend le financement plus accessible et efficace pour les chercheurs.

Nous avons pour objectif d’ajouter une option d’investissement à celles qui existent déjà : actuellement, il est possible d’investir dans des Biotechs en tant que Business Angels, mais cela demande un certain capital et n’est pas accessible à tout le monde, il est également possible d’investir en bourse sur des entreprises pharmaceutiques, mais qui sont déjà matures, avec un profil de risque et de gains possibles plus faible que les investissements dans des projets early-stage. Bientôt, il sera également possible d’investir dans des projets de recherche, avec de faibles montants.

D’où viendra le retour sur investissement des détenteurs des tokens des projets ?

Le détenteur du Science Token bénéficiera contractuellement de droits financiers lui permettant d’obtenir un retour sur investissement en cas de valorisation commerciale du brevet. Le détenteur d’un Royalties-Token bénéficiera quant à lui de retours financiers lors de la commercialisation du produit. Le détenteur de ces tokens pourra également les revendre sur le marché secondaire, qui offrira ainsi la possibilité aux investisseurs de réaliser ainsi une plus-value du fait de l’augmentation probable de la demande du fait de l’avancée du projet.  

En quoi la décentralisation de l’Industrie Pharmaceutique pourrait favoriser sa productivité ? 

L’industrie pharmaceutique souffre actuellement d’une grave crise de productivité de sa R&D. Ce phénomène empirique est appelé « Loi d’Eroom ». Nous pensons que parmi les différents facteurs qui peuvent l’expliquer, un certain nombre sont liés à l’organisation interne de l’Industrie Pharmaceutique, de plus en plus inefficiente et silotée. Nous pensons que l’entreprise pharmaceutique du futur sera un écosystème de start-ups, très réactives et facilement manœuvrables, interconnectées et intéressées à la réussite des unes et des autres, partageant un certain nombre de ressources humaines ou matérielles. La nouvelle organisation du travail permise par les DAOs et le Web3 permet à cette vision de se réaliser. Notre vision à long terme inclut la création d’un DAO (NDLR : une DAO (Decentralized Autonomous Organization) est une entité fonctionnant grâce à un programme informatique qui fournit des règles de gouvernance automatisées à une communauté.) qui constituera un véritable écosystème décentralisé d’innovation en santé et permettra le développement de spin-off afin de valoriser la propriété intellectuelle en partie détenue par la communauté. 

En quoi le modèle mis en place par Nosty pourrait changer la place des patients dans l’industrie de la santé et de la recherche biomédicale ?

Nosty permet aux patients et aux associations de patients de s’impliquer directement dans le financement et le développement de nouvelles thérapies. Cela peut favoriser une plus grande transparence et responsabilité dans l’industrie de la santé et donner aux patients une voix plus forte dans le processus de recherche et de développement que l’on ne retrouve pas aujourd’hui.

Avec Nosty, nous voulons vraiment mettre le patient au centre du projet, c’est pour cela que l’on organisera en plus de la collecte de fonds de nombreuses réunions avec le chercheur pour les informer sur l’évolution du projet de recherche qu’ils soutiennent et créer un lien que l’on pense important entre le scientifique et le patient.

Comment voyez-vous les prochaines évolutions et tendances de la Science Décentralisée ?

La Science Décentralisée est un domaine en plein essor qui tend à transformer la recherche et le développement de médicaments. Ces dernières années, nous avons assisté à l’entrée de grandes entreprises pharmaceutiques dans des projets de Science Décentralisée, comme Pfizer dans VITADAO ou Roche et AstraZenca dans le projet de recherche blockchain de Guardtime. Cette tendance montre que la Science Décentralisée commence à être prise au sérieux par les acteurs traditionnels de l’industrie pharmaceutique.

De plus, de nombreuses start-ups et initiatives voient le jour dans ce domaine, visant à apporter plus de transparence et de collaboration dans la recherche scientifique. La Science Décentralisée offre également la possibilité de mobiliser des investissements de la communauté pour des projets de recherche qui autrement auraient peut-être été ignorés ou abandonnés.

Récemment, Sarah Hamburg, l’une des personnalités publiques ayant le plus d’influence dans le domaine de la Science Décentralisée a publié le tweet suivant : « I think soon AI will eat science and academia. « DeSci » is a vehicle for autonomous AI-powered research. Humans in-the-loop will really just be crowdfunders (who are fractionally rewarded with IP rights associated with outcomes) and lab technicians. ». Chez Nosty, nous sommes assez alignés avec cette vision et pensons que la Science Décentralisée sera, par sa flexibilité, le type d’organisation de la Science dans lequel l’Intelligence Artificielle pourra être implémentée le plus simplement. Nous y travaillerons durant les années à venir.

L’équipe de Resolving Pharma a par le passé également interviewé les fondateurs du projet de Science Décentralisée Molécule. En quoi Nosty est-il différent ?

Bien que Nosty et Molécule partagent une vision commune de la décentralisation de la recherche en santé, les deux projets ont des approches différentes. Nosty se concentre sur la tokénisation de la propriété intellectuelle et des contrats de royalties pour permettre à chacun de participer au financement de projets de recherche innovants, tandis que Molécule se concentre sur le développement d’une infrastructure technique et réglementaire pour permettre aux DAOs de financer des projets de recherche. Dans notre modèle, les détenteurs des Science-Tokens et de Royalties-Tokens les détiennent directement et peuvent espérer obtenir un retour sur investissement (qui n’est bien entendu pas garanti, un risque de perte en capital existe)

Quelles sont les prochaines étapes du développement de Nosty ? Comment nos lecteurs pourraient aider le projet ? 

Notre prochaine étape est de réaliser un POC grandeur nature, et nous avons la chance d’avoir une biotech réputée des Hauts-de-France comme premier projet de recherche à entrer dans la plateforme Nosty. Nous partagerons plus de détails à ce sujet très prochainement. Vous pouvez nous aider d’abord en nous suivant dans nos différents réseaux pour avoir les dernières News et ensuite nous invitons les lecteurs intéressés à investir dans ce premier projet de recherche, qui sera disponible sur la plateforme Nosty au cours du printemps. Cela leur permettra de participer à la mise en place de notre concept et de contribuer au financement de la recherche scientifique. Nous sommes également à la recherche de partenaires et de contributeurs pour nous aider à développer notre écosystème décentralisé d’innovation en santé, que ce soient des chercheurs, des professionnels de l’industrie pharmaceutique, des patients ou des associations de patients. Nous encourageons les personnes intéressées à nous contacter pour en savoir plus sur nos projets et nos besoins en matière de développement : hello@nosty.co

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Introduction à la DeSci

Ou comment la Science du futur est en train de naître sous vos yeux

« [DeSci] transformed my research impact from a low-impact virology article every other year to saving the lives and limbs of actual human beings » Jessica Sacher, co-fondatrice de Phage Directory

Dans un précédent article, l’un des tous premiers publiés sur Resolving Pharma, nous nous étions intéressés aux problématiques posées par le rôle centralisateur des éditeurs scientifiques, qui en plus de poser des questions financières et éthiques, est un frein à l’innovation et à la recherche scientifique. A l’époque, nous avions, en plus de dresser ce constat, proposé des pistes de réflexions pour changer de modèle, en utilisant notamment les NFTs et la Blockchain. Depuis plusieurs mois, et grâce à la popularisation du Web3 et des DAOs, émergent des quatre coins du monde des initiatives en faveur d’une science permettant de faciliter l’intelligence collective, de redessiner les méthodes de financement et de publication de la recherche et, in fine, de réduire considérablement le chemin entre le laboratoire et les patients. Il est temps d’explorer cette révolution dont nous sommes encore à l’année zéro et que l’on appelle la DeSci pour Science Décentralisée.

De la nécessaire émergence de la DeSci

Une histoire est souvent prise en exemple dans le monde de la DeSci, tant elle illustre toutes les inefficiences de la science actuelle : celle de Katalin Kariko, biochimiste hongroise ayant mené de nombreuses recherches à partir des années 1990 (sur l’ARN messager vitro-transcrit) qui seront à l’origine, quelques décennies plus tard de plusieurs vaccins contre le Covid-19. En dépit des aspects novateurs des recherches menées par Katalin Kariko, elle ne put bénéficier des bourses de recherche nécessaires à leur poursuite pour des raisons de rivalités politiques : l’Université de Pennsylvanie dans laquelle elle se trouvait avait fait le choix de privilégier les recherches portant sur des thérapies ciblant directement l’ADN. Le manque de moyens entraina le manque de publications et K. Kariko fut rétrogradée dans la hiérarchie de son unité de recherche. Cet exemple démontre les conséquences délétères que peut avoir une organisation centralisée de l’attribution des financements (principalement les institutions publiques et les fondations privées) et de la gestion de la réputation des scientifiques (les éditeurs scientifiques).

Combien de chercheurs passent davantage de temps à chercher des financements qu’à travailler sur des sujets de recherche ? Combien de dossiers différents dans la forme doivent-ils remplir pour accéder à ces financements ? Combien de recherches prometteuses mais trop risquées ou trop peu conventionnelles sont abandonnées faute de financement ? Combien d’Universités paient des fortunes aux éditeurs scientifiques pour accéder aux connaissances scientifiques qu’elles ont-elles-même contribuées à établir ? Combien de résultats, parfois pervertis par les logiques de publication des éditeurs scientifiques, s’avèrent in fine non-reproductibles ? Avec toutes les barrières à l’échange de données relatives à la publication scientifique, la Science est-elle encore l’entreprise d’Intelligence Collective qu’elle doit être ? Combien de progrès scientifiques pourtant industrialisables et brevetés n’iront finalement pas jusqu’au marché faute de structures entrepreneuriales suffisamment solides et financées pour les porter (bien que des progrès considérables ont été réalisés ces dernières décennies pour permettre aux chercheurs de créer leurs start-up) ?

La DeSci, que nous pourrions tenter de définir comme étant un système d’organisation de la Science permettant, en s’appuyant sur les technologies et les outils Web3, à chacun de financer et de prendre part à la recherche et à la valorisation scientifique en échange de retour sur investissement ou de rémunération, se propose de répondre à toutes les problématiques mentionnées ci-dessus.

Dans un premier temps, cet article s’intéressera aux bases techniques de la Science Décentralisée puis explorera quelques cas d’usage dans lesquels la décentralisation pourrait améliorer l’efficience de la Science.

Tout comprendre au Web3, aux DAOs et à la Science Décentralisée

A l’origine du Web, de très profondes barrières à l’entrée existaient pour les utilisateurs souhaitant émettre des informations : en effet, avant les blogs, les forums et les réseaux sociaux, il fallait être en mesure de rédiger soi-même le code de son site Internet ou de payer quelqu’un pour le faire afin de pouvoir partager du contenu.

Avec l’arrivée, nous l’évoquions, des blogs et des réseaux sociaux, le Web2 a pris un visage différent : l’expression est devenue considérablement plus facile. En revanche, elle s’est accompagnée d’une grande centralisation : les plateformes de réseaux sociaux disposent des contenus que leurs utilisateurs publient et les exploitent commercialement (au travers de revenus publicitaires notamment) sans reverser un centime aux utilisateurs de leurs services.

Le Web3 est une nouvelle version d’Internet dans laquelle la notion de propriété a été introduite au moyen de la Blockchain. En effet, alors que le Web2 était construit sur des infrastructures centralisées, le Web3 utilise la Blockchain. En clair, les échanges de données sont enregistrés sur une Blockchain et peuvent donner lieu à une rétribution en cryptomonnaies ayant une valeur financière mais donnant également, dans certains cas, un pouvoir décisionnel sur les plateformes utilisées par les contributeurs. Le Web 3 est donc un moyen de marquer la propriété d’un contenu ou de rémunérer facilement l’action d’un utilisateur. Le Web3 est sans nul doute la version d’Internet la plus favorable à la création.

Enfin, nous ne pouvons pas évoquer le Web3 sans parler des Decentralized Autonomous Organization (DAOs). Ces organisations sont décrites par Vitalik Buterin, le co-fondateur emblématique de la Blockchain Ethereum, comme étant : « des entités vivant sur Internet et ayant une existence autonome, tout en s’appuyant sur des individus qu’elle embauche pour effectuer les tâches qu’elle ne peut pas faire directement ». De manière plus terre à terre, il s’agit d’assemblées virtuelles dont les règles de gouvernance sont automatisées et inscrites de façon transparente dans une blockchain, permettant ainsi à ses membres d’agir collectivement, sans autorité centrale ni tiers de confiance, et de prendre des décisions selon des règles définies et inscrites dans des Smart-contracts. Leur objectif est de simplifier et de rendre plus sûre, transparente et infalsifiable la prise de décision et l’action collectives. Les DAOs n’ont pas encore révélé leur plein potentiel mais elles ont déjà montré qu’elles pouvaient œuvrer comme des fonds d’investissement, des entreprises ou des associations caritatives décentralisés et efficients. Depuis quelques mois, des DAOs spécialisées dans la Science émergent, basées sur deux innovations technologiques majeures.

Les concepts technologiques sur lesquels s’appuie particulièrement la DeSci :

Pour comprendre le fonctionnement profond de la DeSci et plus particulièrement son immense et révolutionnaire potentiel, il est important de maîtriser deux concepts en particulier, plutôt peu communs dans le très vaste et grandissant domaine du Web3 mais qui se trouvent au cœur d’un certain nombre de projets de DeSci :

  • Les IP-NFTs : Le concept d’IP-NFT a été développé par les équipes de l’entreprise Molecule (dont vous trouverez une interview sur Resolving Pharma). Il constitue une rencontre entre l’IP (la propriété intellectuelle) et les NFTs (les non-fungible tokens) : il permet de tokeniser la recherche scientifique. Cela signifie qu’une représentation d’un projet de recherche est placée sur la Blockchain sous la forme d’un NFT échangeable. Un accord légal est passé automatiquement entre les investisseurs (acheteurs du NFT) et le scientifique ou l’institution qui mène les recherche. Les propriétaires du NFT seront en droit d’obtenir des rémunérations en cas de licensing de la propriété intellectuelle issue des recherches ou de création de start-up à partir de cette propriété intellectuelle.

Figure 1 – Schéma de fonctionnement de l’IP-NFT développé par Molecule (Source : https://medium.com/molecule-blog/molecules-biopharma-ipnfts-a-technical-description-4dcfc6bf77f8)

  • Les Data-NFTs : Beaucoup de projets Blockchain s’intéressent à la patrimonalité de la Data mais l’un des plus aboutis est Ocean Protocol. Un Data-NFT représente un droit d’auteur (ou une licence exclusive) enregistré dans la Blockchain et portant sur un jeu de données. Ainsi, il est possible pour un utilisateur d’exploiter ses données de plusieurs manières : en faisant payer des licences temporaires à d’autres utilisateurs, en vendant ses datasets ou en les collectivisant avec d’autres jeux de données dans le cadre d’un « Data Union ».

Ces deux concepts permettent de rendre sécable et liquide la propriété intellectuelle et ainsi de créer de nouveaux modèles de financement et de collaboration. Prenons un exemple simple : un chercheur peut présenter ses recherches et lever des fonds auprès d’investisseurs avant même qu’un brevet ne soit déposé. En échange, les investisseurs possèdent un IP-NFT qui leur permet de bénéficier d’un certain pourcentage de la propriété intellectuelle et des revenus qui seront potentiellement générés par l’innovation.

Passons désormais à quelques cas d’usage de la DeSci.

Transformer le reviewing scientifique

Lorsqu’un chercheur veut communiquer au reste de la communauté scientifique, il rédige un article qu’il soumet à des éditeurs scientifiques, si ces derniers acceptent le thème de la recherche, ils vont chercher d’autres chercheurs à même de vérifier la validité scientifique de l’article, un processus d’échange avec les auteurs s’ensuit alors : il s’agit du peer-reviewing. Les chercheurs prenant part à ce processus ne sont pas rémunérés par les éditeurs et sont principalement motivés par leur curiosité scientifique.

Ce système, tel qu’il est organisé actuellement – de manière centralisée, fait émerger plusieurs problématiques :

  • Il prend beaucoup de temps : cela prend, dans certaines revues, plusieurs mois entre la première soumission d’un article et sa publication définitive. Ce délai évitable peut être très dommageable à la progression de la science (mais nous y reviendrons plus tard dans cet article !). Par ailleurs, devant l’inflation du nombre d’articles et de revues scientifiques, le système basé sur le bénévolat des reviewers n’est pas dimensionné pour faire face à l’avenir.
  • L’article est soumis aux biais d’appréciation de l’éditeur ainsi qu’à ceux des reviewers, le tout dans un processus opaque, ce qui le rend extrêmement aléatoire. Des études ont montré qu’en soumettant à nouveau un échantillon de papiers déjà publiés et en modifiant les noms et les institutions des auteurs, 89% d’entre eux étaient rejetés (sans que les reviewers ne s’aperçoivent du fait que ces articles étaient déjà publiés)
  • L’intégralité du processus est généralement opaque et indisponible au lecteur final de l’article.

Le peer-reviewing de la Science Décentralisée sera entièrement différent. Plusieurs publications ont démontré la possibilité d’utiliser des DAOs scientifiques thématiques afin de rendre tout le processus plus efficient, équitable et transparent. Nous pouvons ainsi imaginer que la décentralisation pourrait jouer sur différents aspects :

  • Le choix des reviewers ne dépendrait plus uniquement de l’éditeur mais pourrait être approuvé collectivement.
  • Les échanges autour de l’article pourraient être enregistrés sur la Blockchain et seraient ainsi librement accessibles.
  • Plusieurs systèmes de rémunération, financière ou pas, peuvent être imaginés afin d’attirer des reviewers de qualité. Nous pouvons ainsi imaginer que chaque reviewing pourrait faire gagner des tokens permettant de s’inscrire dans un système de réputation (voir ci-dessous), de participer aux prises de décision du DAO mais aussi de participer à des concours dans l’objectif d’obtenir des subventions.

Les systèmes de peer-reviewing décentralisé n’en sont encore qu’à leurs premiers pas et, aussi radicalement prometteurs soient-ils, de nombreux défis restent à surmonter, à commencer par celui de l’interopérabilité entre différents DAOs.

Créer un nouveau système de réputation

La principale proposition de valeur apportée par le système centralisé de la Science est celui du système de réputation des acteurs. Pourquoi souhaitez-vous accéder à des écoles et des Universités prestigieuses, et pourquoi êtes-vous parfois prêts à vous endetter sur de nombreuses années pour cela ? Parce que le fait d’avoir le nom d’une Université donnée sur votre CV vous permettra d’accéder plus facilement aux opportunités professionnelles que vous visez. D’une certaine manière, les entreprises ont délégué une certaine partie de leur recrutement aux écoles et aux universités.  Autre système de réputation, nous l’évoquions plus tôt dans cet article : celui des éditeurs scientifiques, la qualité d’un chercheur n’est-elle pas mesurée au nombre d’articles qu’il a réussi à faire publier dans des revues prestigieuses ?

En dépit de leur coût prohibitif (qui permet aux éditeurs scientifiques de constituer l’une des industries ayant la marge brute la plus haute du monde – difficile de faire autrement lorsque l’on vend quelque chose que l’on obtient gratuitement !), ces systèmes souffrent de graves imperfections : le fait d’être accepté dans une Université et d’obtenir son diplôme reflète-t-il finement l’implication que l’on a eu durant ses études et les compétences que l’on a pu acquérir par diverses expériences à l’intersection du monde universitaire et du monde professionnel ? La réputation d’un scientifique est-elle réellement proportionnelle à son implication dans son écosystème ? Jorge Hirsch, l’inventeur de l’Indice H, ayant pour but de quantifier la productivité et l’impact scientifique d’un chercheur en fonction du niveau de citation de ses publications est d’ailleurs lui-même revenu sur la pertinence de cet indicateur.  Les peer-reviewings, la qualité des cours donnés, l’accompagnement de jeunes chercheurs ou encore l’impact réel de la Science sur la société ne sont en effet pas pris en compte par le système actuel.

Dans le cadre de la DeSci, il sera possible d’imaginer un système basé sur la Blockchain permettant de tracer et d’authentifier les actions d’un chercheur – et pas uniquement le fait de publier des articles – afin de le récompenser à travers des tokens de réputation non échangeables. Le grand défi de ce système de réputation sera encore une fois d’être transversal, interopérable et adopté par différentes DAOs. Nous pouvons imaginer que ces tokens pourront être utilisés pour participer à des votes (dans l’organisation de conférences, dans le choix d’articles, etc) et qu’ils seront eux-mêmes attribués selon des mécanismes de vote (par exemple, les étudiants ayant suivi un cours seront à même de décider collectivement du nombre de tokens à attribuer au professeur).

Transformer les codes de la publication scientifique pour faire émerger l’intelligence collective

La science est une œuvre collective et internationale dans laquelle, actuellement et en tant que chercheur, vous ne pouvez communiquer avec les autres équipes de recherche du monde entier qu’à travers :

  • Des publications dans lesquelles vous ne pouvez pas donner accès à l’ensemble des données générées par vos recherches et expérimentations (on estime qu’environ 80% des données ne sont pas publiées, ce qui participe à la crise de la reproductibilité scientifique
  • Des publications auxquelles les autres chercheurs ne peuvent pas accéder sans payer les éditeurs scientifiques (dans le cas de l’Open Science, c’est l’équipe de recherche à l’origine de la publication qui paie l’éditeur pour que les lecteurs puissent accéder gratuitement à l’article)
  • Des publications qui, par leur forme et les problématiques liées à leur accès, rendent très difficile l’utilisation d’algorithmes de Machine Learning qui pourraient accélérer la recherche
  • Et enfin, des publications scientifiques qui, du fait des durées des mécanismes éditoriaux d’approbation ne reflètent l’état de votre recherche qu’avec plusieurs mois de retard. Des crises sanitaires récentes comme celles du COVID-19 nous ont montré à quel point il pouvait être important de disposer de données qualitatives de manière rapide.

Internet a permis une transformation majeure des manières dont nous communiquons. Le mail et les messageries instantanées permettent, par rapport à la lettre qui mettait des semaines à arriver à son destinataire dans les siècles passés, de communiquer plus souvent et surtout d’envoyer des messages plus courts, à mesure que nous obtenons les informations qu’ils contiennent, sans nécessairement les agréger dans une forme complexe. Seule la communication scientifique, alors même qu’elle se fait désormais majoritairement par le biais d’Internet, résiste à cette tendance, au profit des éditeurs scientifiques et des formes traditionnelles de communication mais aussi et surtout aux dépends du progrès de la science et des patients dans le cas de la recherche biomédicale.

Comment, dans ces conditions, faire émerger l’intelligence collective nécessaire au progrès scientifique ? L’entreprise flashpub.io pense avoir la solution : les micro-publications, constituées d’un titre pensé pour être facilement exploitable par un algorithme de NLP, d’une figure unique, d’une brève description et de liens donnant accès à la totalité des protocoles et des données générées. 

Figure 2 – Structure d’une micro-publication (Source : https://medium.com/@flashpub_io)

Cette idée des micro-publications, si elle n’est pas directement liée à la Blockchain, sera, puisqu’elle permet le partage rapide et facilité de l’information, un remarquable outil d’intelligence collective et assurément, la modalité de communication scientifique la plus adaptée à l’ère à venir de la Science Décentralisée. L’objectif ne sera pas de remplacer les publications classiques mais plutôt d’imaginer une nouvelle manière de faire de la science, dans laquelle le narratif d’une innovation sera construit collectivement tout au long des expérimentations successives plutôt qu’après plusieurs années de travail par une seule équipe de recherche. Des voix contradictoires s’exprimeront et un consensus sera trouvé, ne modifiant pas fondamentalement le modèle classique de la Science mais le rendant plus efficient.

Faciliter le financement de l’innovation et la création de start-up de biotechnologie

Aujourd’hui, le financement de l’innovation, en santé notamment, fait face à un double problème :

  • Du côté des scientifiques et des entrepreneurs : en dépit du développement de nombreux écosystèmes de financement, de subventions non dilutives et de la maturation des fonds de venture capital, la question de la recherche de fonds reste essentielle et problématique pour la plupart des projets. Beaucoup de projets ne survivent pas à ce que l’on appelle la « Vallée de la mort », cette période avant de début des études cliniques durant laquelle lever des fonds est particulièrement compliqué.
  • Du côté des investisseurs : Il est très difficile pour un individu de prendre part au financement de la recherche et aux entreprises de Biotechs de manière satisfaisante.
    • Il peut être Business Angel et entrer tôt au capital d’une start-up prometteuse : cela n’est pas accessible à tous, car il faut un certain capital de départ pour entrer dans une start-up (et encore plus si l’on souhaite diversifier ses investissements pour lisser son risque)
    • Il est possible d’investir en bourse sur des sociétés de biotech cotées : l’espérance de gain est alors bien plus faible, les entreprises étant déjà matures et leurs résultats consolidés.
    • Il est possible de financer la recherche à travers des organismes de charités, mais dans ce cas, aucun retour sur investissement n’est possible et aucun contrôle sur les projets financés ne pourra être exercés.
    • Il est possible d’investir à travers des sites de crownfunding, mais là encore des problèmes structurels sont à mentionner : le choix des entreprises est limité et les investisseurs sont généralement davantage en position de prêteurs que d’investisseurs : ils ne détiennent pas réellement de parts de l’entreprise et seront rémunérés selon un taux annuel défini à l’avance.

L’un des mantras de l’industrie pharmaceutique les plus à la mode en ce moment est de mettre le patient au centre de ses thérapeutiques, ne faudrait-il pas, par cohérence, également lui permettre d’être au centre des systèmes de financement et de développement de ces thérapeutiques ?

La DeSci permettra à chacun – patient, proche de patient ou simplement (crypto)investisseur souhaitant avoir un impact positif sur le monde – via des systèmes d’IP-NFT, de data-NFT ou de tokenisation d’entreprise de financer facilement des projets de drug development quel que soit leur stade, de la recherche académique d’un chercheur à une entreprise déjà constituée.

Ce système de tokenisation des assets permet par ailleurs de générer des revenus complémentaires, à la fois pour l’investisseur et pour le projet cherchant à être financé :

  • Les mécanismes de « prêt lombard » présents dans la Finance Décentralisée permettront également aux investisseurs de générer d’autres types de revenus sur leurs parts des projets. En effet, la DeFi a remis au goût du jour les prêts collatéralisés : un emprunteur peut déposer des actifs numériques (des cryptomonnaies, mais également des NFTs ou des actifs réels tokenisés (entreprises, immobiliers, etc) en échange d’un autre actif (qui représente une fraction de la valeur qu’il a déposée, afin de protéger le prêteur) qu’il pourra investir selon différents mécanismes propres à la Finance Décentralisée et que nous ne développerons pas dans cet article. Ainsi, dans un système classique de private equity, l’argent investi dans une start-up est bloqué jusqu’à la possibilité d’un exit et ne génère pas de rendements autres que ceux attendus du fait de l’augmentation de la valorisation de l’entreprise. Dans le nouveau système décentralisé, une partie de l’argent que vous avez investi peut être placé en parallèle dans l’équivalent crypto d’un compte épargne (simplifions les choses, ce site n’étant pas dédié à la Finance Décentralisée !)
  • Par ailleurs, une autre possibilité pour les projets biotech, qu’ils soient déjà constitués sous forme d’entreprise ou pas, de générer des revenus supplémentaires est de tirer profit de la liquidité des actifs (qui n’existe pas dans le système de financement traditionnel) : il est tout à fait envisageable d’appliquer une taxation de quelque % à chaque transaction d’un IP-NFT ou d’un data-NFT.

Nous sommes dans un monde où il est parfois plus facile de vendre une image de singe pour 3 ou 4 millions de dollars que de lever cette somme pour combattre une pathologie mortelle. Il est temps de le comprendre et d’actionner les bons leviers pour aller chercher l’argent là où il se trouve – parfois très loin des sentiers battus.

Conclusion : une communauté naissante, beaucoup de travail et de grandes ambitions

En dépit d’initiatives à très haut potentiel de l’implication de plus en plus importante d’une communauté scientifique à travers le monde, la DeSci est encore jeune et reste à structurer, de nombreux défis seront à relever pour construire le futur. L’un des principaux, en dehors des aspects relatifs au cadre réglementaire, sera sans nul doute celui de l’éducation au sens large et il n’est pas encore adressé par les projets actuels. En utilisant les outils Web3 pour réinventer la manière dont peut se construire et se financer un cursus de haut niveau (vous serez demain payés pour suivre des formations en ligne – oui oui !), la DeSci se donnera les moyens d’intégrer les esprits les plus créatifs et entrepreneuriaux de son époque, à la manière dont les grands incubateurs ou fonds d’investissement comme Y Combinator ou Tech Stars ont misé sur l’éducation pour créer ou accélérer le développement des entreprises les plus impressionnantes de ces dernières années. Les Universités collaboratives de la DeSci doivent émerger, et la connexion entre l’Ed3 (l’éducation et l’apprentissage à l’ère du Web3) et la DeSci reste encore à mettre en œuvre.

Figure 3 – Présentation de l’écosystème DeSci embryonnaire à la conférence ETH Denver, le 17 février 2022 (depuis 3 mois, l’écosystème en pleine ébullition s’est considérablement enrichi d’autres projets)

Le Web 3.0 et les DAOs ont la grande particularité de permettre de récompenser en equity, ou équivalent, des personnes prenant part à un projet en mettant leurs compétences ou leurs moyens financiers à profit, et ce quelle que soit l’étape de développement d’un projet.  Ainsi, dans un monde décentralisé où les compétences et le matériel de recherche sont à portée de main, et où les intérêts des individus impliqués dans un projet sont plus alignés, le temps écoulé entre l’émergence d’une idée et son exécution est sensiblement plus faible que dans un monde centralisé. Ce modèle, pouvant réinventer le travail mais aussi ce qu’est une entreprise, s’applique à tous les domaines mais est particulièrement pertinent là où l’intelligence collective est importante et où des expertises de pointe de différents types sont nécessaires, comme la recherche scientifique.

De la même manière que nous pouvons raisonnablement penser que Bitcoin prendra de plus en plus de place dans le système monétaire international dans les années et décennies à venir, nous pouvons penser que la DeSci, étant donné ses caractéristiques et qualités intrinsèques, prendra de plus en plus de place face à ce que nous appellerons peut-être dans les prochaines années la « TradSci » (la Science organisée de manière traditionnelle). En permettant un alignement d’intérêt parfait de ses différents acteurs, la DeSci constituera probablement l’outil collaboratif d’Intelligence Collective le plus abouti et viable à grande échelle et sur le long terme dont n’aura jamais disposé Homo Sapiens. Lutte contre le réchauffement climatique, conquête spatiale, éradication de toutes les maladies, ou extension de la longévité humaine, la DeSci sera probablement le catalyseur des prochaines décennies d’innovations scientifiques et, en cela, impactera positivement votre vie. Ne passez pas à côté de l’opportunité d’en être l’un des premiers artisans !


Pour aller plus loin :

Crédits de l’illustration de l’article : 
  • Background : @UltraRareBio @jocelynnpearl and danielyse_, Designed by @katie_koczera
  • Montage : Resolving Pharma

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Interviews

Interview de Christophe Baron, Fondateur de Louis App : « Des NFTs pour favoriser la prévention des maladies et la longévité »

Questions posées par Alexandre Demailly

Nous remercions Monsieur Christophe Baron pour son temps et ses réponses et souhaitons longue vie à Louis App ! Pour découvrir l’application : https://www.louisapp.io/

1] Pouvez-vous nous présenter votre entreprise et le projet qu’elle développe ?

Nous sommes partis du constat que l’espérance de vie recule et que l’espérance de vie en bonne santé stagne à cause de nos modes de vie : sédentarité et mauvaise alimentation. Les habitudes prisent ne sont pas faciles à changer et nous avons cherché un moyen de faire comprendre à l’utilisateur que son mode de vie a un impact direct sur son espérance de vie. (Cf études citées en bas d’article). 

2] Pourquoi pensez-vous qu’il est nécessaire de se focaliser sur la prévention ? Pouvez-vous nous en dire plus sur le concept de « minutes de vie » développé par votre entreprise ? Comment la propriété intellectuelle qui y fait référence a-t-elle était constituée ?

L’adage « il vaut mieux prévenir que guérir » relève bien du bons sens mais aussi de la science. La prévention permet vraiment d’éviter que des pathologies apparaissent. Parfois les gens changent de mode de vie mais il est trop tard. Quelqu’un qui a fumé pendant 25 ans 20 cigarettes par jour mettra beaucoup de temps avant de récupérer des poumons en bon état et la maladie pourra malgré tout s’installer.

Louis est une application de prévention santé qui mesure vos progrès au travers d’un compteur de minutes de vie gagnées en mangeant mieux et en bougeant plus. C’est unique et nous avons déposé un brevet à l’INPI. (Notes de Resolving Pharma : Institut National de la Propriété Intellectuelle)

Aujourd’hui on saisit son activité physique et ses repas et on mesure l’impact avec une projection à 20 ans. Nous sommes en train de mettre en place l’IA afin de prendre en photo son assiette puis que l’appli reconnaisse le contenu et la famille alimentaire. De la même manière nous allons proposer dans une V2 la récupération automatique de l’activité physique du smartphone et des autres devices pour réduire la saisie au maximum.

3] En quoi votre application se différencie-t-elle d’un projet comme Step’N qui incite les utilisateurs à pratiquer une activité physique mais qui met l’accent sur les aspects financiers (avec notamment la nécessité d’un investissement initial) ?

StepN est un vraiment une formidable application qui s’adresse à un public initié au monde de la cryptomonnaie et il faut acheter une paire de basket. (Notes de Resolving Pharma : En effet, l’achat d’un NFT – représentant une basket – est nécessaire à l’utilisation de l’application)

Louis s’adresse au contraire à un public de non-initiés dans laquelle les utilisateurs verront leur progression au travers de paliers mais aussi d’argent : Health and Earn. Par ailleurs, nous prenons en compte l’alimentation, le tabac ce qui n’est pas le cas dans StepN.

4] Quelle est l’utilité des NFTs distribués aux utilisateurs de l’application ? 

Cette étape est en cours de finalisation, mais il est fort probable que les utilisateurs soient récompensés en réductions chez des partenaires liés à la santé, au sport et à la nutrition. Nous sommes en contact avec des diététiciens qui pourraient coacher nos utilisateurs avec un prix remisé. De plus, d’autres récompenses très motivantes et compréhensibles par tous sont aussi prévues.

5] Vous allez également intégrer un token dans votre projet. A quoi servira-t-il ? Quels seront les mécanismes qui régiront son économie ?

NFT et tokens seront liés et à ce stade nous préférons ne pas trop en dire. Encore une fois, cette terminologie ne sera pas employée et nous parlerons un langage compréhensible par tout le monde.

6] Quelle est la Blockchain d’infrastructure utilisée par votre projet et quels ont été les arguments qui ont motivés votre choix ?

Les choix techniques ne sont pas encore arrêtés nous étudions différentes solutions dont Polygon. (Notes de Resolving Pharma : Polygon est une solution de seconde couche ou layer 2 de la Blockchain Ethereum, qui permet aux transactions de s’effectuer sur un réseau avec des commissions inférieures et une vitesse plus élevée que sur la Blockchain Ethereum tout en conservant une interopérabilité avec celle-ci)

7] Avez-vous prévu de réaliser une ICO/STO/IDO ou d’utiliser l’univers des cryptomonnaies pour trouver des financements (je pense notamment aux programmes de subventions mis en place par certaines Blockchains) ? 

Effectivement une ICO est prévue : elle permettra de récompenser nos utilisateurs, de mettre en place un DAO afin de permettre de voter pour des projets liées à la R&D (contre le diabète par exemple), elle nous permettra aussi de recruter pour améliorer l’application et lancer de nouveaux modules ; Nous venons de lancer un module de prévention diabète très simple d’utilisation et prévoyons de lancer un module de prévention cardiaque, prévention cancer, observance…. Notre Road map est très bien structurée. On le sait, 40 % des cancers, au moins, viennent de nos modes de vie et pourraient donc être évités !

Très rapidement nous allons lancer une campagne Ulule afin de communiquer. Merci de nous suivre et d’y participer…. Il y aura une très belle surprise en contrepartie.

8] Actuellement, seuls 8% des Français détiennent des cryptomonnaies. Qu’avez-vous prévu de mettre en place afin de démystifier cet univers auprès des patients qui utiliseront votre application ?

On ne parlera pas de crypto dans l’application mais de progrès liés à la prévention au travers de minutes de vie gagnées, de paliers franchis et de récompenses pécuniaires.

9] Quels sont les piliers sur lesquels repose le business model de votre entreprise ?

L’appli est gratuite aujourd’hui mais nous allons passer par la suite à un modèle Freemium avec abonnement mensuel ou annuel.

10] Les projets mêlant Blockchain et Santé sont encore relativement rares en France. Comment sont perçues les thématiques Web3 dans l’écosystème français des start-up santé ?

Certains parlent de formation médicale dans la métaverse, de coaching santé…. Je pense qu’il est encore trop tôt pour avoir une vision claire.

11] Que pourriez-vous conseiller à un jeune entrepreneur souhaitant lancer un projet au carrefour du Web3 et de la santé ?

3 choses très simples et essentielles :

  • Mettre en place un conseil scientifique
  • Ne pas hésiter à se faire coacher 
  • Lire, être en veille permanente

Pour aller plus loin :

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Clinique Préclinique Recherche exploratoire

L’intelligence artificielle contre les infections bactériennes : le cas de bactériophages

« If we fail to act, we are looking at an almost unthinkable scenario where antibiotics no longer work and we are cast back into the dark ages of medicine »

David Cameron, former UK Prime Minister

Des centaines de millions de vies sont en jeu. En effet, l’OMS a fait de l’antibiorésistance sa priorité numéro une à l’échelle globale en démontrant notamment que la résistance aux antibiotiques pourra entrainer plus de 100 millions de morts par an d’ici 2050 et qu’elle cause déjà actuellement environ 700 000 morts par an, dont 33 000 en Europe. Parmi les différentes stratégies thérapeutiques pouvant être mises en place, il y a celle de l’utilisation des bactériophages, approche alternative ancienne et délaissée à laquelle l’Intelligence Artificielle pourrait bien donner un coup de jeune. Explications.

Les stratégies pouvant être mises en place pour lutter contre l’antibiorésistance

Les actions et recommandations de santé publique visant globalement à réduire l’utilisation des antibiotiques, nombreuses et indispensables, constituent le premier pilier de lutte contre l’antibiorésistance. Par exemple :

  • La poursuite des campagnes de communication visant à lutter contre la prescription et la consommation excessives d’antibiotiques (qui, en France, ne connaît pas le slogan : « Les antibiotiques, ce n’est pas automatique ! » ?)
  • L’amélioration des conditions sanitaires afin de réduire la transmission des infections et par conséquent les besoins en utilisation des antibiotiques. Cette mesure concerne de très nombreux pays en voie de développement dont les approvisionnements défaillants en eau potable provoquent, notamment, de nombreuses diarrhées infantiles.
  • La réduction de l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage, en interdisant l’ajout de certaines molécules antibiotiques dans l’alimentation des animaux destinés à l’alimentation humaine.
  • La réduction de la pollution environnementale avec des molécules antibiotiques, en travaillant notamment à l’établissement de standards anti-pollution plus contraignants pour les sites fabricants de l’industrie pharmaceutique.
  • L’amélioration et la mise en place de structures globales de surveillance de la consommation humaine et animale d’antibiotiques et de l’apparition de souches bactériennes multi-résistantes.
  • La mise en œuvre plus fréquente de tests diagnostiques afin de limiter l’usage d’antibiotiques et de sélectionner de manière plus précise quelle molécule est nécessaire.
  • L’utilisation plus massive de la vaccination

Le deuxième pilier de la lutte est constitué par des stratégies thérapeutiques novatrices destinées à combattre les souches bactériennes multirésistantes face auxquelles les antibiotiques conventionnels sont impuissants. Nous pouvons notamment citer :

  • La phagothérapie : c’est-à-dire l’utilisation de bactériophages, virus prédateurs naturels des bactéries. Les phages peuvent être utilisés dans les cas thérapeutiques où ils peuvent être directement mis au contact des bactéries (plaies infectées, grands brulés, etc) mais pas dans les cas où ils devraient être injectés dans l’organisme, car ils seraient alors détruits par le système immunitaire du patient.
  • L’utilisation d’enzybiotiques: des enzymes, principalement issues des bactériophages à l’instar de la lysine, pouvant être utilisées afin de détruire des bactéries. A l’heure où nous écrivons ces lignes, cette approche est toujours à un stade expérimental.
  • L’immunothérapie avec notamment l’utilisation d’anticorps : De nombreux anticorps monoclonaux anti-infectieux – ciblant spécifiquement un antigène viral ou bactérien – sont en développement. Le palivizumab dirigé contre la protéine F du virus respiratoire syncytial a, quant à lui, été approuvé par la FDA dès 1998. La piste de l’utilisation synergique d’anticorps anti-infectieux et de molécules antibiotiques est également à l’étude.

Chacune des stratégies – thérapeutique ou de santé publique – proposées peut être mise en application et voir son effet décuplé à l’aide de la technologie. L’une des utilisations les plus originales de l’Intelligence Artificielle concerne l’automatisation du design de nouveaux bactériophages.

Présentation des bactériophages

Les bactériophages sont des virus à capside n’infectant que des bactéries. Ils sont naturellement répandus dans tous les espaces de la biosphère et leur matériel génétique peut être de l’ADN, dans la très grande majorité des cas, ou de l’ARN. Leur découverte n’est pas récente et leur utilisation thérapeutique a déjà un long historique, en effet, dès les années 1920 ils commencent à être utilisé en médecine humaine et animale. Leur usage a été progressivement abandonné dans les pays occidentaux, principalement en raison de la facilité d’utilisation des antibiotiques et du fait que les essais cliniques menés sur les phages ont été relativement peu nombreux, leur utilisation étant essentiellement basée sur l’empirisme. Dans d’autres pays du monde, à l’instar de la Russie et des anciens pays de l’URSS, la culture de l’utilisation des phages dans la santé humaine et animale est restée très forte : ils sont souvent disponibles sans ordonnance et utilisés en première intention.

Le mécanisme de destruction des bactéries par les bactériophages lytiques

Il existe deux types principaux de bactériophages :

  • D’une part les phages lytiques, qui sont les seuls utilisés en thérapeutique et ceux sur lesquels nous nous concentrerons dans la suite de cet article, qui détruisent la bactérie en détournant la machinerie bactérienne à leur profit afin de se multiplier.
  • D’autre part, les phages tempérés, qui ne sont pas utilisés en thérapeutique mais utiles expérimentalement car ils permettent d’ajouter des éléments génomiques à la bactérie, lui permettant potentiellement de moduler sa virulence. Le cycle du phage est nommé lysogénique.

Le schéma ci-dessous présente le cycle de vie d’un phage lytique :

Ainsi, et c’est ce qui fait toute la puissance des phages lytiques, ils sont dans une relation « hôte-parasite » avec les bactéries, ils ont besoin de les infecter et de les détruire pour se multiplier. L’évolution des bactéries va sélectionner principalement des souches résistantes, comme dans le cas de la résistance aux antibiotiques, cependant, à la différence des antibiotiques qui n’évoluent pas – ou plutôt qui évoluent lentement, au rythme des découvertes scientifiques de l’espèce humaine, les phages pourront également s’adapter afin de survivre et de continuer à infecter les bactéries, il s’agit d’une sorte de course à l’évolution entre les bactéries et les phages.

L’utilisation possible de l’Intelligence Artificielle

L’une des particularités des phages est, qu’à l’inverse de certains antibiotiques à large spectre, ils sont la plupart du temps très spécifiques à une souche bactérienne. Ainsi, lorsque l’on souhaite créer ou trouver des phages appropriés au traitement du patient, il faut suivre un processus complexe et souvent relativement long, alors même qu’une course contre la montre est parfois engagée pour la survie du patient : il faut identifier les bactéries, ce qui suppose de cultiver des prélèvements réalisés chez le patient, de caractériser le génome bactérien puis de déterminer quel phage sera le plus à même de combattre l’infection. Cette étape était, jusqu’à peu, un processus itératif de tests in-vivo, très gourmand en temps, or, comme le souligne Greg Merril, le CEO de la start-up Adaptive Phage Therapeutics, développant un algorithme de sélection des phages à partir des génomes bactériens : « Quand un patient est sévèrement touché par une infection, chaque minute est importante ».

En effet, pour rendre la phagothérapeutique applicable à très large échelle, il est nécessaire de pouvoir déterminer rapidement et à coût moindre quel phage sera le plus efficace. C’est ce que permet déjà et permettra de plus en plus l’alliance de deux technologies : le séquençage à haute fréquence et le machine learning. Ce dernier permettant de traiter les masses de données générées par le séquençage génétique (génome du bactériophage ou de la souche bactérienne) et de détecter des patterns par rapport à une base de données expérimentales lui indiquant qu’un Phage au génome X a été efficace contre une bactérie au génome Y.  L’algorithme est alors en mesure de déterminer les chances de réussite de toute une bibliothèque de phages sur une bactérie donnée et de déterminer quel sera le meilleur sans réaliser de longs tests itératifs. Comme chaque domaine basé sur le « test-and-learn », le choix des phages peut ainsi être automatisé.

Outre la détermination du meilleur hôte pour un bactériophage donné (et réciproquement) discutée ci-dessous, les principaux cas d’usage décrits de l’intelligence artificielle dans l’utilisation des phages sont :

  • La classification des bactériophages : L’organisme en charge de la classification est l’International Committee on Taxonomy of Viruses (ICTV). Plus de 5000 bactériophages différents sont décrits et la famille principale est celle des Caudovirales. Les approches traditionnelles de classification des bactériophages reposent sur la morphologie de la protéine virion qui sert à injecter le matériel génétique dans la bactérie cible. Ces approches sont basées essentiellement sur des techniques de microscopie électronique. Une littérature scientifique de plus en plus fournie permet de considérer le Machine Learning comme une alternative pertinente permettant une classification des bactériophages plus fonctionnelle.
  • La prédiction des fonctionnalités des protéines du bactériophages : Le Machine Learning peut notamment être utile pour élucider les mécanismes précis de la PVP (Phage Virion Protein), impliquée, comme mentionné plus haut, dans l’injection de matériel génétique dans la bactérie.
  • La détermination du cycle de vie des bactériophages : Ainsi que nous l’avons vu plus haut dans cet article, il existe deux catégories de phages : lytiques ou tempérés. Traditionnellement, la détermination de l’appartenance d’un phage à l’une de ces deux familles était déterminée par une culture et des tests in-vitro. La tâche est plus ardue que l’on pourrait le penser car sous certaines conditions de stress et en présence de certains hôtes, les phages tempérés ont la capacité, pour survivre d’effectuer des cycles lytiques. A l’heure actuelle, les algorithmes de PhageAI sont en mesure de déterminer à 99% dans quelle catégorie se situe le phage.

Il est également possible, et c’est ce qu’illustre le schéma ci-dessous, pour des bactéries rares et particulièrement résistantes de combiner les techniques vues précédemment aux techniques de biologie synthétique et de bio-engineering afin de créer rapidement des phages « sur-mesure ». Dans ce cas d’usage tout particulièrement, l’Intelligence Artificielle offre à observer tout son potentiel dans le développement d’une médecine ultra-personnalisée.

***

En dépit de son utilité, la phagothérapie est, dans de nombreux pays occidentaux encore compliquée à mettre en place réglementairement. En France, cette thérapeutique est possible dans le cadre d’une Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU) nominative aux conditions que le pronostic vital du patient soit engagé ou que son pronostic fonctionnel soit menacé, que le patient soit dans une impasse thérapeutique et qu’il soit l’objet d’une infection mono-microbienne. L’utilisation de la thérapeutique doit par ailleurs être validée par un Comité Scientifique Spécialisé Temporaire Phagothérapie de l’ANSM et un phagogramme – test in vitro permettant d’étudier la sensibilité d’une souche bactérienne aux bactériophages, à la manière des antibiogrammes – présenté avant la mise sous traitement. Devant ces difficultés multiples, de nombreuses associations de patients se mobilisent afin de militer pour un accès simplifié à la phagothérapie. Avec l’aide de l’Intelligence Artificielle, de plus en plus de phagothérapeutiques pourront être développées, comme l’a illustré cet article et devant l’urgence et l’ampleur de la problématique de l’antibiorésistance, il est indispensable de préparer dès à présent le cadre réglementaire dans lequel les patients pourront accéder aux différents traitements alternatifs, dont les bactériophages. Le combat n’est pas encore perdu et l’Intelligence Artificielle sera pour nous un allié déterminant.

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Entrepreneuriat Interviews

Interview – Molecule, la start-up qui souhaite révolutionner le financement du développement de médicaments avec la Blockchain

L’équipe de Resolving Pharma est heureuse d’inaugurer une série d’entretiens avec des start-ups créant le monde pharmaceutique de demain par cette interview de Molecule.to,  jeune et ambitieuse entreprise allemande souhaitant changer les règles du Drug Development en utilisant la technologie Blockchain d’une manière inédite.

Nous remercions l’équipe de Molecule pour cet échange et tout particuliérement Heinrich Tessendorf. Cette version française est une traduction, que nous espérons la plus fidèle possible, de notre échange en anglais.

Certains termes utilisés dans cet entretien sont techniques et très spécifiques au domaine de la Blockchain, afin de faciliter la compréhension du projet de Molecule.to, un glossaire a été ajouté en fin d’interview. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions ou souhaitez discuter du sujet. Bonne lecture !

Interview réalisée par Alexandre Demailly et Quentin Vicentini.

Resolving Pharma : Avec Molecule, vous êtes en train de tenter de réinventer, parmi d’autres choses, le financement de la R&D Pharmaceutique. Pouvez-vous nous expliquer comment votre plateforme fonctionne ?

Molecule : Notre plateforme est une marketplace qui permet de faire passer la propriété intellectuelle early-stage dans le monde du Web3 via les NFTs. A cela s’ajoutent des DAOs orientés vers les biotechs dans lesquels des communautés se réunissent pour financer la recherche dans des domaines thérapeutiques spécifiques. Ces communautés se composent de patients, de chercheurs et de passionnés.

En pratique, tout cela se met en place lorsque les chercheurs téléversent un projet sur notre site Web. A partir de là, d’autres chercheurs, investisseurs ou communautés de patients peuvent découvrir ces projets et décider d’investir dans l’un ou l’autre de ceux-ci. Une fois que ces acteurs ont décidé dans quel projet ils allaient investir, ils peuvent connecter leur wallet web3 (par exemple Metamask) et financer le projet en achetant un IP-NFT. Les droits de propriété intellectuelle seront ainsi immédiatement transférés à l’acheteur et les fonds pourraient être transférés au chercheur exactement au même moment.

Resolving Pharma : Quels sont les objectifs de votre entreprise ? Quelle est votre vision ?

Molecule : Notre vision est simple : nous voulons de créer des communautés de patients, de chercheurs et d’investisseurs pour financer et gérer le développement de médicaments. Pour cela, nous transformons la propriété intellectuelle en une classe d’actifs très liquide et fondée sur les données.

Au cours des deux prochaines années, notre objectif est que notre protocole finance autant de R&D qu’une entreprise pharmaceutique de taille moyenne. Avec cela, nous avons l’ambition de doubler notre équipe, de lancer Molecule V2 ainsi que le Molecule DAO. Nous souhaitons également voir la licence de notre premier actif être achetée par une société pharmaceutique.

Nous espérons que la « biotechnologie décentralisée » fera pour l’accès aux thérapies et aux médicaments ce que les FinTech et la finance décentralisée ont fait pour la façon dont nous obtenons l’accès aux services financiers.

Resolving Pharma : Comment les projets soumis sont sélectionnés et évalués ?

Molecule : Les projets peuvent être soumis via la Molecule’s Discover App ou en utilisant le formulaire de soumission de projet de VitaDAO

Sur la Discover App de Molecule, tout chercheur peut télécharger son projet et les investisseurs peuvent le découvrir. Actuellement, nous avons plus de 300 projets listés sur cette plateforme. Ces projets ne sont pas évalués par les équipes de Molecule, c’est aux investisseurs de décider dans quels projets ils veulent investir.

Sur le formulaire de soumission de projet de VitaDao, vous pouvez soumettre, en tant que chercheur, votre projet axé sur la longévité, mais le concept est différent dans la mesure où vous demandez un financement pour votre projet à VitaDao. Une due diligence est mise en place de la même manière que ce qui est réalisé par l’industrie biopharmaceutique. En d’autres termes, la taille du marché, la concurrence, l’équipe et d’autres paramètres sont pris en compte. Cependant, VitaDao souhaite financer des projets présentant un plus haut niveau de risque et à un stade plus précoce que ceux pouvant être financés par les mécanismes de financement traditionnels. VitaDao souhaite en outre se concentrer sur les projets favorisant la longétivité et l’augmentation de la durée de vie. Cela présente une particularité majeure car le vieillissement n’est pas reconnu comme une maladie par les agences gouvernementales à l’instar de la FDA. Par conséquent, il est compliqué d’évaluer le marché de manière traditionnelle. Les investisseurs de VitaDao acceptent cette difficulté et ont des stratégies incluant la poursuite d’essais cliniques dans des pays ayant un cadre juridique favorable et/ou des pays prêts à travailler avec les promoteurs pour concevoir des essais cliniques utilisant des biomarqueurs pertinents pour évaluer l’impact de la thérapeutique sur la longétivité.

Les projets soumis pour financement par le biais de VitaDAO sont évalués par le conseil d’évaluation scientifique de VitaDAO. Celui-ci émet alors un avis concernant le financement. L’évaluation est indépendante de la décision finale de financement. Ainsi, si un projet remplit les conditions requises pour être financé, une proposition de financement est envoyée aux détenteurs de jetons VitaDAO votent finalement pour ou contre le financement du projet de R&D.

Resolving Pharma : Comment investir dans un projet de recherche en utilisant votre plateforme ?

Molecule : Actuellement, chaque investisseur doit être un utilisateur vérifié sur Molecule pour investir dans les projets de recherche proposés. Pour vous permettre d’investir directement dans un projet de recherche, nous avons besoin de certaines informations de la part de l’investisseur. Notre plateforme est compatible avec le Web3, donc une fois que les investisseurs ont été « whitelistés » et qu’ils ont sélectionné un projet qu’ils souhaitent financer, les étapes sont similaires à celles de l’achat d’un NFT sur OpenSea. En pratique, les étapes sont les suivantes :

  • Créez un compte d’investisseur sur Molecule
  • Explorez les projets de recherche dans votre domaine d’intérêt. Si vous souhaitez entrer en contact avec des chercheurs spécifiques dont les coordonnées ne figurent pas dans la liste, n’hésitez pas à nous contacter via info@molecule.to
  • Faites vous « whitelister » pour les ventes d’IP-NFT : en effet pour participer à la vente des IP-NFT et faire des offres aux chercheurs, Molecule doit recueillir certaines informations auprès des investisseurs privés. Ces informations seront utilisées principalement pour contacter les investisseurs et leur permettre de signer les accords juridiques sous-jacents aux IP-NFTs. Pour déclencher le whitelisting, veuillez prendre contact avec info@molecule.to
  • Faites des offres sur les IP-NFTs : vous êtes maintenant prêt à faire des offres pour de nouveaux projets de recherche ou pour des IP-NFTs existants. Nous vous tiendrons informé des nouvelles opportunités de financement. Si vous êtes intéressé par le financement de projets qui ne figurent pas encore sur Molecule, n’hésitez pas à mettre le chercheur en contact avec nos équipes.
  • Transferez des fonds et réceptionnez l’IP-NFT : une fois que votre offre a été acceptée par un chercheur, il vous sera demandé de transférer les fonds sur un compte séquestre. Dès que la réception des fonds, le NFT sera envoyé sur le Wallet à l’origine des fonds.
  • Gérez votre IP-NFT : Vous pouvez, dès la réception de l’IP-NFT faire des offres de vente, consulter l’accord juridique sous-jacent et les données de l’asset, le tout via la plateforme Molecule.

Resolving Pharma : Comment les investisseurs individuels peuvent-ils choisir entre les différents projets ?

Molecule : Les investisseurs individuels devront faire leurs propres recherches et vérifications préalables (note de Resolving Pharma : dans le milieu des cryptomonnaies et de la blockchain, l’acronyme DYOR est souvent utilisé pour Do Your Own Researchs) et consulter un conseiller scientifique. Les particuliers choisiront très probablement des projets qui les intéressent personnellement, en choisissant par exemple ceux destinés à traiter une pathologie dont ils sont atteints ou dont souffre un membre de leur famille. Une grande partie des informations dont ils ont besoin se trouvent sur la page du projet mais ils peuvent contacter les chercheurs individuels via la page du projet pour poser des questions supplémentaires.

Lorsqu’un DAO (par exemple VitaDAO) finance un projet, il dispose d’un groupe d’experts en la matière (le conseil d’évaluation scientifique) qui le conseille sur les projets à financer. La décision est ensuite formalisée par une proposition de gouvernance qui est soumise à un vote et la décision finale est prise par tous les détenteurs du jetons par vote démocratique pour oui ou pour non.

Resolving Pharma : Quels sont les avantages du financement décentralisé du développement de nouveaux médicaments ?

Molecule : Si la propriété intellectuelle est cloisonnée et détenue par des entreprises individuelles, celles-ci peuvent avoir tendance à ne publier que les données positives, ce qui entraîne une asymétrie de l’information. Ce n’est pas ainsi que la science est censée fonctionner. La communauté des chercheurs pourrait obtenir les résultats souhaités beaucoup plus rapidement si la recherche était menée de manière plus ouverte et collaborative. L’apprentissage peut se faire beaucoup plus rapidement et les coûts peuvent être réduits en diminuant la duplication du travail. Une chose qui peut contribuer à faciliter cela est d’attirer l’attention sur les projets de recherche par le biais d’un marché public mondial.

Resolving Pharma : Comment votre modèle se différencie-t-il des plateformes de crowdfunding ?

Molecule : La plateforme de Molecule est différente du crowfunding, car les nouvelles approches de la propriété démocratisée (note de Resolving Pharma : en particulier relatives à la Blockchain et aux DAOs) permettent aux parties prenantes d’être directement copropriétaires des thérapies qui les concernent. Imaginez un monde où un nouveau traitement à l’insuline serait la propriété collective des diabétiques – quelles seraient les conséquences sur l’accès et les prix ? Et les patients pourraient avec un impact direct et leur mot à dire sur les médicaments développés pour eux ? Les communautés aident à mettre les médicaments sur le marché, non seulement en les finançant mais également en en devenant les co-propriétaires actifs.

Resolving Pharma : Pouvez-vous nous expliquer le concept d’IP-NFT ? Comment cela est-il sécurisé d’un point de vue légal ?

Molecule : L’IP-NFT est une nouvelle norme que nous avons développée. Les IP-NFTs représentent l’intégralité des droits légaux de propriété intellectuelle et permettent l’accès aux données pour la recherche biopharmaceutique. Considérez l’IP-NFT comme un jeton unique sur la blockchain Ethereum. Ce jeton sera lié à un accord juridique que le chercheur aura conclu avec les investisseurs. Grâce au fractionnement, au transfert sans friction et à la collatéralisation de la propriété intellectuelle dans des systèmes financiers décentralisés (DeFi), il débloque une nouvelle valeur autour de la propriété intellectuelle biopharmaceutique. Fondamentalement, l’IP-NFT permet le financement, la liquidité et la valorisation de la propriété intellectuelle et de la recherche.

D’un point de vue juridique, l’IP-NFT permet de négocier les droits/licences juridiques réels de la propriété intellectuelle. Cela se fait au moyen d’un contrat légal et d’un contrat intelligent qui se réfèrent l’un à l’autre. Le contrat légal est une licence de propriété intellectuelle faisant référence aux transactions, adresses et signatures dans la blockchain. Le contrat intelligent est un NFT dont le code fait référence à l’accord de licence de propriété intellectuelle, en masquant certains éléments de données confidentielles et en les stockant sur des réseaux de stockage de fichiers décentralisés. Combinés, le contrat légal et le contrat intelligent créent l’IP-NFT. Les acheteurs bénéficient ainsi d’un contrôle d’accès sécurisé à la propriété intellectuelle et aux données, ce qui accélère la procédure de due-diligence et réduit les coûts. Vous pouvez en savoir plus sur la configuration à la fois technique et juridique d’un IP-NFT dans cet article Medium : Molecule’s Biopharma IP-NFTs — A Technical Description

Resolving Pharma : Comment les décisions sont prises concernant la gestion de la propriété intellectuelle des projets ? Quel est le rôle des DAOs ?

Molecule : VitaDAO est gouverné par ses membres. Toutes les décisions sont soumises à un processus décisionnel prédéfini par le code du protocole, qui est inclusif et transparent pour tous les membres. Les décisions de moindre importance sont prises de manière informelle sur le forum Discourse ou sur serveur Discord de VitaDao, mais peuvent être soumises à un vote directement « on-chain » où toute personne possédant des jetons Vita peut voter. Les décisions qui sont contestées et qui ont un impact notables sur les parties prenantes de VitaDAO en affectant les processus de manière fondamentale ou qui impliquent une utilisation importante de fonds sont toujours soumises à un vote sur la chaîne et nécessitent l’accord d’une majorité relative des détenteurs de jetons.

Resolving Pharma : A ce propos, pouvez-vous en dire plus sur VitaDAO ? Comment ce projet pourrait contribuer à prolonger l’espérance de vie humaine ?

Molecule : VitaDao est une organisation autonome décentralisée (DAO) qui a pour objet de financer des projets de recherche sur la longévité et de régir leur propriété intellectuelle par le biais d’IP-NFT. Considérez VitaDAO comme le véhicule de la démocratisation de l’accès aux produits thérapeutiques dans le monde de la biotechnologie de la longétivité, afin de rendre ces actifs largement accessibles aux personnes du monde entier.

A propos du rôle que joue le projet dans l’allongement de l’espérance de vie humaine : VitaDAO finance des recherches en phase initiale et pourrait, par exemple, transformer ces projets de recherche en sociétés de biotechnologie. A titre d’exemple, le premier projet financé par VitaDAO cherche à valider des observations sur la longétivité par une série d’expériences en laboratoire. Ce travail pourrait aboutir à la réorientation de plusieurs traitements approuvés par la FDA pour prolonger la durée de vie humaine, à un coût moindre et dans des délais plus courts qu’avec la découverte de médicaments de novo.

Resolving Pharma : Si nos lecteurs veulent vous aider et participer à vos projets, que peuvent-ils faire ?

Molecule : La meilleure manière est de rejoindre notre Discord, de vous présenter et de discuter avec nous. Vous pouvez également joindre directement notre Community Manager par la biais de son adresse mail : heinrich@molecule.to

Si vous souhaitez en apprendre davantage sur le projet, vous pourrez vous reporter :

Glossaire :

  • Web3 : « Le Web3 fait référence à une troisième génération d’Internet où les services et les plateformes en ligne passent à un modèle basé sur les blockchains et les cryptomonnaies. En théorie, cela signifie que les infrastructures sont décentralisées et que toute personne qui possède un jeton associé à cette infrastructure a un certain contrôle sur elle. Ce modèle du web représente une vision financiarisée d’internet. »
  • NFT pour Non-Fongible Token : « Un NFT désigne un fichier numérique auquel un certificat d’authenticité numérique a été attaché. Plus exactement, le NFT est un jeton cryptographique stocké sur une blockchain. Le fichier numérique seul est fongible, qu’il s’agisse d’une photo, d’une vidéo ou autre, le NFT associé est non fongible. »
  • DAOs : « Une DAO (Decentralized Autonomous Organization) est une entité fonctionnant grâce à un programme informatique qui fournit des règles de gouvernance automatisées à une communauté. La DAO est un contrat intelligent, complexe, déployé sur la blockchain Ethereum, et qui s’apparente à un fonds de capital-risque décentralisé. Ces règles sont inscrites de façon immuable et transparente dans une blockchain, une technologie de stockage et de transmission d’informations sécurisée et qui fonctionne sans organe central de contrôle. Une DAO se distingue, en théorie, d’une entité classique de trois manières : elle ne peut pas être arrêtée ou fermée, personne ni aucune organisation ne peut la contrôler (et donc en manipuler les chiffres) et, enfin, tout y est transparent et auditable, cela dans un cadre supranational. Une DAO repose sur du code informatique : ses règles de fonctionnement sont publiques et elle ne s’appuie sur aucune juridiction. »
  • WhiteList : « L’expression liste blanche (en anglais whitelist) définit, dans le contexte des projets Blockchain, un ensemble de personnes auxquelles on attribue un niveau de liberté ou de confiance maximum dans un système particulier »

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Redessiner le partage des données de vie réelle avec la Blockchain

« [La blockchain] est une technologie compliquée et dont les acteurs de santé n’ont pas forcément compris tout le potentiel. Nous voulons justement démontrer […] que la blockchain fonctionne quand on travaille sur les usages ! » Nesrine Benyahia, Directrice Générale de DrData

***

L’accès aux données de santé de vie réelle devient un enjeu de plus en plus important pour les entreprises pharmaceutiques, une acquisition facilitée de ces données pourrait accélérer et rendre moins couteux le développement de nouveaux médicaments. Après avoir explicité les pratiques d’acquisition de données dans l’industrie pharmaceutique, et les initiatives actuelles visant à les faciliter, cet article s’intéressera dans un second temps aux projets d’utilisation de la Blockchain dans les échanges, la monétisation et la sécurisation de ces si précieuses données.

Utilisation des données de vie réelle par l’Industrie Pharmaceutique, où en est-on ?

Selon la définition communément admise, les données de vie réelle sont des données qui ne sont pas collectées dans un cadre expérimental et sans intervention sur les modalités usuelles de prise en charge des patients, l’objectif étant ainsi de refléter la pratique courante du soin. Ces données peuvent parfois compléter les données issues d’essais cliniques randomisés et contrôlés – qui ont l’inconvénient de n’être vraies que dans le cadre très limité des essais cliniques. L’utilisation des données de vie réelle est appelée à se développer de plus en plus pour deux raisons essentielles. Premièrement, des outils technologiques nouveaux permettent de les récolter (dispositifs médicaux connectés par exemple) quand d’autres permettent de les analyser (data science, text-mining ces forums de patients, exploitation de la littérature grise, etc). Deuxièmement, nous observons depuis quelques années désormais une évolution réglementaire qui permet de plus en plus des accès précoces et des preuves cliniques sur des effectifs faibles (notamment dans le cas d’essais sur des médicaments contre le cancer) et qui tend ainsi à déplacer le curseur de la preuve vers les données de vie réelle.

Les utilisations des données de vie réelle sont variées et concernent le développement de nouveaux médicaments – afin notamment de définir de nouveaux algorithmes de prise en charge, ou de découvrir des besoins médicaux non couverts à travers l’analyse des bases de données – mais aussi le suivi de produits déjà sur le marché – nous pouvons citer à ce titre plusieurs cas d’usage comme la surveillance de la sécurité et de l’usage, l’accès au marché avec la prise en charge financière sous conditions ou le paiement à la performance. Ces données peuvent à la fois permettre d’éclairer les décisions des autorités de santé mais également les décisions stratégiques des industriels du médicament.

L’acquisition et l’exploitation actuelle des données de vie réelle : Les sources de données sont très variées, avec des degrés de maturité et de disponibilité variables, ainsi que des procédures d’accès variables. Certaines de ces données sont issues directement du soin, comme les données des bases médico-administratives ou encore les données des systèmes d’information hospitaliers, quand d’autres sont produites directement par les patients, à travers des réseaux sociaux, des applications de gestion des thérapeutiques et encore des dispositifs médicaux connectés. L’accès à ces données pour les industriels du médicament se fait suivant des modalités variées. Comme beaucoup d’autres pays, la France a œuvré ces dernières années à mettre en place des mesures organisationnelles et réglementaires afin de faciliter l’accès à ces données de vie réelle, à organiser leur recueil et leur exploitation avec notamment la création du Health Data Hub. Cependant, à ce jour, dans le contexte français et européen, aucune plateforme ne permet aux patients d’avoir accès de l’intégralité de leurs données de santé et d’en disposer librement pour participer à tel ou tel projet de recherche.

Imaginer un système décentralisé de partage des données de santé, les premiers pas :

Pour rappel, la blockchain est une technologie cryptographique développée à la fin des années 2000 permettant de stocker, d’authentifier et de transmettre des informations de manière décentralisée (sans intermédiaire ni tiers de confiance), transparente et hautement sécurisée. Pour davantage d’informations à propos du fonctionnement de la Blockchain, nous vous invitons à vous reporter à notre précédent article traitant de cette technologie : « Blockchain, Applications mobiles : la technologie permettra-t-elle de résoudre le problème des médicaments contrefaits ? ». Ainsi que nous l’expliquions déjà dans cet article, la toute jeune technologie Blockchain a jusqu’à présent principalement exprimé son potentiel dans le domaine des crypto-monnaies, mais il est possible d’imaginer des usages dans de très nombreux autres champs d’application.

Ainsi, plusieurs équipes de recherche travaillent sur la manière dont cette technologie pourrait potentiellement répondre aux grands défis de confidentialité, d’interopérabilité, d’intégrité et d’accessibilité sécurisée – entre autres – posés par le partage des données de santé.

Ces équipes de recherche académiques ont imaginé des blockchains permettant de réunir différents acteurs : les services de soins, les patients, les utilisateurs de données (qui peuvent être les patients eux-mêmes ou d’autres organismes producteurs de soins.) Ces systèmes ne prévoient pas l’accès aux données par des tiers (industriels par exemple), ils ont pour seuls objectifs d’améliorer la qualité du soin et d’offrir aux patients une plateforme regroupant leurs données de santé fragmentées : aux USA, les données sont silotées du fait de l’organisation du système de santé ; en France, si la Sécurité Sociale a un rôle centralisateur, le service « Mon Espace Santé » permettant aux patients d’accéder à la totalité de leurs données et descendant du Dossier Médical Partagé, tarde à se mettre en place.

Ces projets académiques proposent d’une part, de stocker les informations médicales sur une blockchain privée – et d’autres part d’opérer des Smart Contracts ayant différents usages. Les Smart Contracts sont des équivalents informatiques des contrats traditionnels, ils leur sont cependant différents car leur exécution ne nécessite ni tiers de confiance ni intervention humaine (ils s’exécutent lorsque les conditions prévues par le code informatique sont réunies). Dans ces propositions de systèmes de partage des données de vie réelle, ils permettent notamment d’authentifier l’identité des utilisateurs, de garantir l’intégrité des données, leur confidentialité et la flexibilité de leur accès (les personnes non-autorisées ne peuvent accéder aux données des patients).

En dépit de leurs qualités théoriques, ces projets académiques n’intègrent pas la possibilité pour les patients d’ouvrir l’accès à leurs données à des projets de recherche. Dans la dernière partie de cette article, nous allons passer en revue deux exemple de start-up cherchant à répondre à cette problématique en utilisant la Blockchain.

Exemple de deux projets blockchain permettant aux patients de partager leurs données de santé :

Embleema est une start-up qui propose une plateforme sur laquelle des patients peuvent télécharger leurs données de santé – allant de leur génome complet aux résultats de leurs examens médicaux, en passant par des données issues de dispositifs médicaux connectés. Parallèlement à cela, des entreprises pharmaceutiques peuvent exprimer des besoins, un algorithme de la plateforme va alors sélectionner les patients qui pourraient correspondre à ce besoin, par leur pathologie ou par les traitements qui leur sont prescrits. Il leur sera alors proposé de signer un document de recueil de consentement pour participer à une étude observationnelle, en échange de quoi ils seront rémunérés (aux USA) ou pourront choisir une association de patients qui bénéficiera d’un financement (en France). Les données produites par les patients sont stockées sur les serveurs centralisés d’hébergeurs spécialisés en données de santé et seuls les industriels qui les ont achetées y ont accès. La blockchain Ethereum et son système de smart contracts interviennent dans le modèle d’Embleema uniquement pour attester la conformité et organiser le partage des documents relatifs à l’étude (recueil du consentement du patient, etc). On peut donc s’interroger sur la valeur ajoutée de la Blockchain dans ce modèle. Ces documents n’auraient-ils pas pu être stockés sur des serveurs centralisés ? Et les actions déclenchées par les smart contracts réalisées à partir de base de données centralisées, Embleema agissant comme un tiers de confiance ? Quelle est la part d’utilisation marketing du terme Blockchain dans ce modèle ? En tout cas, la plateforme Patient Truth développée par Embleema a le grand mérite de proposer un modèle dans lequel les patients ont le contrôle de leurs données de santé et le choix de s’impliquer dans tel ou tel projet de recherche académique ou industriel.

***

La deuxième société à laquelle nous allons nous intéresser dans cet article est MedicalVeda, une start-up canadienne dans laquelle la blockchain tient une place plus centrale, avec notamment le lancement d’une token ERC-20 (une cryptomonnaie standard utilisant la blockchain Ethereum, pouvant être programmée pour participer à un Smart Contract). Le fonctionnement de cette entreprise qui cherche à résoudre plusieurs problèmes à la fois – en ce qui concerne l’accès aux données de santé par les industries de la santé mais également à propos de l’accès aux soins côté patient – est assez complexe et conceptuel et nous allons tenter de le vulgariser au maximum. La proposition de valeur de MedicalVeda repose sur plusieurs produits :

  • Le VEDA Health Portal, qui est une plateforme visant à centraliser les données de santé d’un patient, au profit des soignants et de programmes de recherche de l’industrie pharmaceutique auxquels le patient peut décider de donner accès. De manière similaire aux projets précédemment cités dans cet article, l’objectif est de vaincre le défi du silotage de données. Les données sont sécurisées par une blockchain privée.
  • La Medical Veda Data Market Place qui a pour objectif de mettre directement en relation les patients et les industriels du médicament en fonction de leurs besoins. Les transactions se font à l’aide de la blockchain et sont rétribuées en crypto-monnaies.
  • Deux autres produits sont à mentionner : le MVeda token, qui est la cryptomonnaie de la plateforme de vente des données, qui permet de rétribuer les patients, et Medfi Veda, un système de finance décentralisée permettant aux patients américains d’emprunter de l’argent pour financer des interventions médicales en mettant en collatérale leurs jetons de crypto monnaie MVeda. Ce système de prêt à collatéral est classique dans la finance décentralisée mais il faut reconnaître que les détails du système développé par MVeda restent obscurs. L’objectif du système étant d’une certaine manière de permettre aux patients de mettre en collatéral leurs données de santé afin de faciliter leur accès aux soins.
***

En conclusion, la Blockchain est une technologie encore jeune qui a connu un très grand intérêt dans le monde de la santé en 2018 avant de se tarir progressivement depuis, en raison principalement d’une mauvaise compréhension de son potentiel et d’un manque d’éducation des professionnels de santé à ce sujet d’une part, et d’autre part en raison d’une utilisation marketing trop importante de ce qui était devenu un « buzz-word ». Les qualités intrinsèques de cette technologie permettent d’imaginer des modèles créatifs et ambitieux de partage des données de santé qui seront peut-être demain à l’origine d’une accélération du développement de nouveaux médicaments. Pour le moment, et en dépit d’initiatives courageuses et intelligentes dans ce sens dont certaines sont déjà commercialisées, aucune solution n’est pleinement fonctionnelle à très grande échelle,  tout reste à construire.


Pour aller plus loin :

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Clinique Préclinique Recherche exploratoire

Impression 3D et intelligence artificielle : futur de la galénique ?

« Dans dix ans, aucun patient n’acceptera de prendre la même chose qu’un autre million de personnes. Et aucun médecin ne prescrira la même chose à deux patients »

Fred Paretti de la start-up spécialisée dans l’impression 3D de médicaments Multiply Labs.

L’impression 3D – également appelée fabrication additive – est l’une des technologies capables de transformer le développement pharmaceutique et qui, en tout cas, prendra assurément part à la digitalisation du secteur de la fabrication de médicaments. Ce court article tentera de faire le point sur le fonctionnement de l’impression 3D, sur ses différents cas d’usage dans la fabrication de médicaments personnalisés, sur la réglementation encadrant à l’heure actuelle cette technologie novatrice et enfin sur les synergies pouvant exister avec l’intelligence artificielle.

*******

L’impression 3D, où en est-on ? 

Le principe de l’impression 3D, développé depuis le début des années 2000 et désormais utilisé dans un très grand nombre de domaines industriels, consiste à superposer des couches de matières en respectant des coordonnées réparties selon 3 axes (en trois dimensions) en suivant un fichier numérique. Ce fichier 3D est découpé en tranches horizontales et envoyé à l’imprimante 3D lui permettant d’imprimer une tranche après l’autre. La terminologie « impression 3D » réunit des techniques très différentes les unes des autres :

  • Le dépôt de fil fondu ou l’extrusion : un fil en plastique est chauffé jusqu’à sa fusion et déposé aux points d’intérêt, par couches successives, qui se lient entre elles par le plastique se solidifiant en refroidissant. Il s’agit de la technique la plus courante, utilisée par les imprimantes grand public.
  • La photopolymérisation de la résine : une résine photosensible est solidifiée à l’aide d’un laser ou d’une source de lumière très concentrée, couche par couche. Il s’agit de l’une des techniques permettant un niveau de détail très élevé.
  • Le frittage ou la fusion de poudre : un laser est utilisé pour, par l’énergie qu’il dégage, permettre l’agglomération des particules de la poudre. Cette technique est utilisée pour produire des objets en métal ou en céramique

Dans l’industrie pharmaceutique, l’impression 3D est utilisée de plusieurs façons dont les principales sont :

  • La réalisation de dispositifs médicaux, en utilisant les techniques classiques d’impression de composés plastiques ou métalliques ou des techniques plus particulières permettant aux dispositifs médicaux d’acquérir des propriétés originales, à l’image des prothèses de la start-up Lattice Medical permettant aux tissus adipeux de se régénérer.
  • Le bio-printing, permettant, en imprimant avec des cellules humaines, de reconstituer des organes comme la peau ou encore des patch cardiaques à l’image de ce que réalise une autre start-up française : Poietis
  • Enfin, et c’est ce qui sera abordé dans cet article, l’impression 3D a également un rôle à jouer dans la galénique en permettant d’imprimer, à partir d’un mélange composé d’excipient(s) et de substance(s) active(s) un médicament à voie d’administration orale

L’impression 3D de médicaments, pour quels usages ? 

L’impression 3D permet d’apporter une caractéristique essentielle à la fabrication des médicaments : la flexibilité. Cette flexibilité est importante pour :

  • La fabrication de petits lots cliniques : les phases cliniques I et II requièrent souvent des lots de médicaments expérimentaux de tailles modestes pour lesquels l’impression 3D trouve toute son utilité : il est parfois économiquement risqué de faire à ce stade de grands investissements sur la fabrication des médicaments. Par ailleurs, il est souvent nécessaire de modifier la teneur en principe actif des médicaments utilisés, l’impression 3D permettrait d’adapter ces lots en temps réel. Enfin, l’impression 3D peut également être utile pour proposer aux patients des placebos les plus ressemblant possible à leurs traitements habituels.
  • Avancer vers la médecine personnalisée : L’impression 3D des médicaments permet de créer des médicaments « à la carte » en mélangeant plusieurs principes actifs avec des teneurs différentes pour chaque patients. Dans le cas de patients dont les poids et les capacités d’absorption varient avec le temps (enfants ou personnes âgées dénutries par exemple), l’impression 3D pourrait également adapter leurs traitements en temps réel en fonction de l’évolution de leur poids, notamment en termes de dosages et de rapidité de dissolution.

Pour répondre à ces différentes problématiques, la plupart des grands acteurs pharmaceutiques s’intéressent de plus en plus à l’impression 3D des médicaments. Ils investissent massivement dans ce domaine ou concrétisent des partenariats, à l’image de Merck, coopérant avec la société AMCM afin de mettre en place un système d’impression conforme aux bonnes pratiques de fabrication. L’implémentation de cette solution a le potentiel de bouleverser le schéma traditionnel de fabrication comme l’illustre le schéma ci-dessous.

Figure 1 – Modification des étapes de fabrication d’un comprimé par implémentation de l’impression 3D (Source : Merck)

La réglementation 

Le premier médicament commercialisé imprimé en 3D a été approuvé par la FDA en 2015. Sa substance active est le lévétiracétam. L’objectif de l’utilisation de l’impression 3D pour ce médicament était d’obtenir un comprimé plus poreux, se dissolvant plus facilement et convenant mieux aux patients souffrant de troubles de la déglutition. En dépit de ces premières approbations et de ces premiers accès au marché, la réglementation reste encore à construire, il est en effet encore nécessaire d’évaluer les changements de bonnes pratiques que cette technologie de l’impression 3D pourrait imposer et déterminer quels types de tests et de contrôles devraient être mis en œuvre. Les contrôles qualité destructifs n’étant pas particulièrement adaptés aux petits lots produits par la technique de l’imprimante 3D. Pour le moment, il n’existe à notre connaissance aucune imprimante 3D agrée GMP pour la fabrication de médicaments.

L’avenir de l’impression 3D des médicaments passera-t-il par l’intelligence artificielle ?

Un nombre d’auteurs de plus en plus importants pensent que l’impression 3D de médicaments ne pourra sortir des laboratoires et devenir une technologie couramment utilisée dans l’industrie qu’à la condition d’intégrer l’intelligence artificielle. En effet, dans l’état actuel des choses, du fait de la grande flexibilité évoquée plus haut, l’utilisation de l’impression 3D requiert une longue phase itérative : il est nécessaire de tester des milliers de facteurs concernant notamment les excipients utilisés mais également les paramètres de l’imprimante ainsi que la technique d’impression à sélectionner. Le choix de ces différents facteurs se fait actuellement par l’équipe de galénique en fonction de ses objectifs et contraintes : quelle est la meilleure combinaison de facteurs pour répondre à un critère donné de pharmacocinétique ? Quels sont ceux qui permettent de minimiser les coûts de production ? Quels sont ceux qui permettent de respecter au mieux un éventuel cadre réglementaire ? Quels sont ceux qui permettent de produire rapidement ? Cette phase itérative est extrêmement consommatrice en temps et en capitaux, ce qui contribue à rendre l’impression 3D de médicaments incompatible pour le moment avec les impératifs du développement pharmaceutique. L’Intelligence Artificielle semble être le moyen le plus simple à déployer pour surmonter ce défi et pour rendre « evidence-based » le choix multi-dimensionnel des paramètres à mettre en œuvre en fonction des objectifs. L’Intelligence artificielle pourra également être impliquée dans le contrôle qualité des lots ainsi fabriqués.

L’utilisation de l’Intelligence Artificielle pour designer de nouveaux médicaments ouvre la perspective de nouveaux défis techniques, notamment en ce qui concerne la disponibilité des données nécessaires à ces modèles de Machine Learning, souvent conservées dans le secret des laboratoires pharmaceutiques.  Nous pouvons imaginer que des bases de données pourront tout de même être constituées en pratiquant le text-mining sur les articles scientifiques et des brevets traitant des différentes formes galéniques et des différents types d’excipients puis complétées de manière expérimentale, ce qui demandera une dépense en temps de travail non négligeable. Parallèlement à ces défis techniques, il sera également nécessaire de se poser des questions plus éthiques, notamment en ce qui concerne le bouleversement des responsabilités causé par l’implémentation de ces nouvelles technologies : qui serait responsable en cas de libération d’un lot non conforme ? Le fabricant de l’imprimante 3D ? Le développeur de l’algorithme qui a designé le médicament ? Celui de l’algorithme qui a validé le contrôle qualité ? Ou encore le Pharmacien Responsable du laboratoire ?

Au total, nous pouvons conclure que l’impression 3D des médicaments est une technologie déjà bien maîtrisée, dont le marché est en croissance de 7% chaque année pour atteindre un marché envisagé de 440 millions de dollars en 2025, mais dont l’utilité est jusqu’à présent limitée à certains cas d’usage mais qui pourrait demain, du fait du déblocage de son potentiel par combinaison à l’Intelligence Artificielle nous permettre d’atteindre un développement galénique et une fabrication des formes orales totalement automatisés et optimisés, enfin adaptés à la médecine ultra-personnalisée qui vient.

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Pour aller plus loin :

  • Moe Elbadawi, Laura E. McCoubrey, Francesca K.H. Gavins, Jun J. Ong, Alvaro Goyanes, Simon Gaisford, and Abdul W. Basit ; Disrupting 3D Printing of medicines with machine learning ; Trends in Pharmacological Sciences, September 2021, Vol 42, No.9
  • Moe Elbadawi, Brais Muñiz Castro, Francesca K H Gavins, Jun Jie Ong, Simon Gaisford, Gilberto Pérez , Abdul W Basit , Pedro Cabalar , Alvaro Goyanes ; M3DISEEN: A novel machine learning approach for predicting the 3D printability of medicines ; Int J Pharm. 2020 Nov 30;590:119837
  • Brais Muñiz Castro, Moe Elbadawi, Jun Jie Ong, Thomas Pollard, Zhe Song, Simon Gaisford, Gilberto Pérez, Abdul W Basit, Pedro Cabalar, Alvaro Goyanes ; Machine learning predicts 3D printing performance of over 900 drug delivery systems ; J Control Release. 2021 Sep 10;337:530-545. doi: 10.1016/j.jconrel.2021.07.046
  • Les médicaments imprimés en 3D sont-ils l’avenir de la médecine personnalisée ? ; 3D Natives, le média de l’impression 3D ; https://www.3dnatives.com/medicaments-imprimes-en-3d-14052020/#!
  • Les médicaments de demain seront-ils imprimés en 3D ? ; Le mag’ Lab santé Sanofi ; https://www.sanofi.fr/fr/labsante/les-medicaments-de-demain-seront-ils-imprimes-en-3D
  • Press Releases – Merck and AMCM / EOS Cooperate in 3D Printing of Tablets ; https://www.merckgroup.com/en/news/3d-printing-of-tablets-27-02-2020.html

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Pourquoi réalisons-nous encore des méta-analyses à la main ?

« It is necessary, while formulating the problems of which in our further advance we are to find solutions, to call into council the views of those of our predecessors who have declared an opinion on the subject, in order that we may profit by whatever is sound in their suggestions and avoid their errors. »

Aristote, De anima, Livre 1, Chapitre 2

Les revues systématiques de la littérature et les méta-analyses constituent des outils indispensables à la synthèse des connaissances actuelles et à l’éclosion de nouvelles connaissances scientifiques. Leur utilisation dans l’industrie pharmaceutique est variée et est appelée à encore se diversifier. Cependant,  elles sont particulièrement limités par le manque de scalabilité de leurs méthodologies actuelles, extrêmement consommatrices en temps humain et aux coûts prohibitifs. A l’heure à laquelle les articles scientifiques sont disponibles au format numérique et à laquelle les algorithmes de Natural Language Processing permettent d’automatiser la lecture de textes, ne devrions-nous pas inventer des méta-analyses 2.0 ? Des méta-analyses boostées par l’intelligence artificielle, plus rapides et moins coûteuses, permettant d’exploiter davantage de données, d’une manière plus qualitative et à des fins différentes, constituent-elles un objectif atteignable à court terme ou un rêve irréaliste ?

La méta-analyse : méthodes et présentation

Une méta-analyse est basiquement une analyse statistique qui combine les résultats de nombreuses études. La méta-analyse, lorsqu’elle est bien réalisée constitue le gold-standard de la génération de preuves scientifiques et cliniques, en effet, l’agrégation d’échantillons et d’informations permet d’obtenir une puissance statistique importante. Cependant la manière dont est réalisée la méta-analyse peut affecter très profondément les résultats obtenus.

La réalisation d’une méta-analyse suit par conséquent une méthodologie très précise composée de différentes étapes :

  • Dans un premier temps, un protocole de recherche sera mis en place afin de déterminer quelle est la question à laquelle l’étude doit répondre, quels sont les critères d’inclusion et d’exclusion des articles que nous allons retenir. C’est également à ce stade du projet que l’algorithme de recherche est déterminé et testé.
  • Dans un second temps, la recherche est effectuée à proprement parler à l’aide de l’algorithme de recherche sur des bases de données d’articles. Les résultats sont exportés.
  • Les articles sont sélectionnés à partir des titres et des abstracts. Les raisons de l’exclusion d’un article sont mentionnées et seront comptabilisées dans le rapport final de la méta-analyse.
  • La validité des études sélectionnées est ensuite évaluée sur la base des caractéristiques des sujets, du diagnostic ainsi que du traitement.
  • Les différents biais sont contrôlés de manière à éviter les biais de sélection, d’extraction des données ainsi que les biais liés aux conflits d’intérêt et aux sources de financement.
  • Un test d’homogénéité sera réalisé afin de s’assurer que la variable évaluée est la même pour chaque étude. Il faudra également vérifier que les caractéristiques de collecte des données des études cliniques sont similaires
  • Une analyse statistique ainsi qu’une analyse de sensibilité sont menées.
  • Enfin, les résultats sont présentés dans une perspective quantitative et/ou qualitative dans le cadre d’un rapport de méta-analyse, d’une publication. Les conclusions sont discutées.

La revue systématique de la littérature (SLR), à l’inverse de la méta-analyse, dont elle partage un certain nombre d’étapes méthodologiques, n’a quant à elle pas de dimension quantitative mais a uniquement pour objet d’organiser et de décrire précisément un champ de la connaissance.

Le problème de scalabilité d’un outil puissant

Le problème de scalabilité est simple à mettre en équation et ne fera que s’empirer au fil du temps : l’augmentation du volume des données générées par des essais cliniques à traiter dans les revues de littérature est exponentielle alors que les méthodes utilisées pour l’extraction et le traitement de ces données n’ont que peu évolué et restent essentiellement manuelles. Les limites intellectuelles de l’homme sont ce qu’elles sont et l’humain ne peut se disrupter lui-même.

Ainsi qu’évoqué rapidement en introduction de cet article, les réalisations de méta-analyses sont relativement coûteuses en temps humain. On estime ainsi que 1000 heures de travail humain hautement qualifié sont nécessaires au minimum pour une simple revue de la littérature et que 67 semaines sont nécessaires entre le début du travail et sa publication. Ainsi les méta-analyses sont des outils ayant une inertie importante et dont la temporalité n’est à l’heure actuelle pas adaptée à certaines utilisations, comme la prise de décision stratégique qui nécessite parfois de disposer de certaines données rapidement. Des publications illustrent la réalisation de revues de la littérature complètes en 2 semaines et 60 heures de travail à l’aide d’outils d’automatisation utilisant l’intelligence artificielle.

« Le temps, c’est de l’argent » dit-on. Des universitaires ont ainsi calculé qu’en moyenne chaque méta-analyse coûte environ 141 000 dollars. Cette équipe a également déterminé que les 10 plus grandes entreprises pharmaceutiques dépensaient chacune environ 19 millions de dollars par an en méta-analyses. Même si ces sommes ne paraissent pas très importantes rapportées aux diverses autres dépenses de générations de preuves cliniques, elles ne sont tout de même pas négligeables et l’on peut envisager qu’un coût plus faible pourrait permettre la réalisation de davantage de méta-analyses ce qui permettrait notamment d’explorer la possibilité de réaliser des méta-analyses des données pré-cliniques et de potentiellement réduire le taux d’échec des essais cliniques – actuellement 90% des composés entrant en étude clinique échouent à démontrer une efficacité et une sécurité suffisantes pour atteindre la commercialisation.

Réduire la problématique de scalabilité de la méthodologie des revues de la littérature et des méta-analyses permettrait de travailler davantage et plus facilement avec des données issues d’essais pré-cliniques. Ces données présentent un certain nombre de spécificités qui complexifient leur utilisation dans le cadre des revues systématiques de littérature et des méta-analyses : les volumes de données sont extrêmement importants et évoluent particulièrement rapidement, les designs des études pré-cliniques ainsi que la forme des rapports et articles sont très variables et rendent les analyses ainsi que l’évaluation de la qualité des études particulièrement complexes. Cependant les revues systématiques de la littérature et autres méta-analyses portant sur les données pré-cliniques ont différentes utilisations : elles permettent d’identifier des trous dans les connaissances et d’orienter des recherches futures, d’informer le choix d’un design d’étude, d’un modèle, d’un critère de jugement ou encore la pertinence ou pas de démarrer un essai clinique. Différentes méthodologies d’exploitation des données précliniques ont été mises au point par des groupes universitaires et chacune d’elles s’appuie très largement sur des techniques d’automatisation faisant intervenir le text-mining et de manière générale l’intelligence artificielle.

L’un des autres problèmes récurrents des méta-analyses est qu’elles sont réalisées à un instant T et qu’elles peuvent devenir très rapidement obsolètes après leur publication, lorsque de nouvelles données ont été publiées et de nouveaux essais cliniques achevés. Autant de temps et d’énergie dépensés pour, dans certains cas après seulement quelques mois ou quelques semaines, présenter des conclusions imprécises ou partiellement fausses. Nous pouvons imaginer que la réalisation automatisée de méta-analyses permettrait de mettre à jour en temps réel leurs résultats.

Enfin, nous pouvons penser que cette automatisation permettrait également de contribuer à une évaluation davantage uniformisée de la qualité des études cliniques inclues dans les analyses. En effet, de nombreuses publications démontrent le fait que la qualité des études sélectionnées, ainsi que les biais qui peuvent les affecter, sont rarement évalués et que lorsqu’ils le sont, cela se fait selon des scores variés prenant peu de paramètres en compte – à titre d’exemple, la Jadad Score ne tient compte que de 3 caractéristiques méthodologiques – et cela est bien normal : le recueil des informations, même lorsqu’elles sont peu nombreuses, nécessite des efforts supplémentaires d’extraction et de traitement de données.

Les problèmes de scalabilité ainsi posés, quelles sont les solutions existantes ou envisageables ?

De nombreux outils déjà développés

L’automatisation des différentes étapes des méta-analyses est un champ de recherche de nombreux groupes universitaires et quelques outils ont été développés. Sans faire aucunement offense à ces outils, dont nous allons citer quelques exemples ci-dessous, il est permis de s’interroger sur les raisons pour lesquelles ils ne sont pas davantage utilisés actuellement. Le marché n’est-il pas assez mature ? Les outils, très fragmentés dans leur proposition de valeur, ne conviennent-ils pas à la réalisation complète d’une méta-analyse ? Ces outils, développés par des laboratoires de recherche, bénéficient-ils d’un marketing suffisant ? D’interfaces suffisamment user-friendly ?

Ainsi que mentionné plus haut, la plupart des outils et prototypes développés se focalisent sur une tâche bien précise de la méthodologie de la méta-analyse. Ainsi, nous pouvons mentionner par exemple Abstrackr spécialisé dans le screening des articles, ExaCT se focalisant quant à lui sur l’extraction des données ou encore RobotReviewer destiné à l’évaluation automatique des biais dans les rapports des essais cliniques contrôlés et randomisés.

Conclusion : une amélioration par l’automatisation ?

Lorsque nous tenons compte du champ d’exploration académique bourgeonnant concernant les méta-analyses automatisées ainsi que les différentes initiatives entrepreneuriales concernant ce domaine (nous pouvons notamment mentionner la toute jeune start-up : Silvi.ai), nous ne pouvons qu’acquérir la forte conviction que de plus en plus, la méta-analyse deviendra une tâche dédiée aux robots et que le rôle des humains se circonscrira à définir le protocole de recherche, en étant assisté par un logiciel nous permettant de faire les meilleurs choix possibles en termes de scope et d’algorithmes de recherche. Ainsi, en dehors des économies directes que permettra l’automatisation des méta-analyses, de nombreuses économies indirectes seront à prendre en compte, et notamment celles qui seront permises par les meilleures décisions qui seront prises, de débuter ou pas un essai clinique par exemple. Au total, l’automatisation des méta-analyses prendra part à l’invention de médicaments plus efficiente et plus rapide.

Resolving Pharma, dont le projet est de lier réflexion et action, s’investira dans les mois à venir dans l’élaboration concrète de solutions d’automatisation des méta-analyses.

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Pour aller plus loin :
  • Marshall, I.J., Wallace, B.C. Toward systematic review automation: a practical guide to using machine learning tools in research synthesis. Syst Rev 8, 163 (2019). https://doi.org/10.1186/s13643-019-1074-9
  • Clark J, Glasziou P, Del Mar C, Bannach-Brown A, Stehlik P, Scott AM. A full systematic review was completed in 2 weeks using automation tools: a case study. J Clin Epidemiol. 2020 May;121:81-90. doi: 10.1016/j.jclinepi.2020.01.008. Epub 2020 Jan 28. PMID: 32004673.
  • Beller, E., Clark, J., Tsafnat, G. et al. Making progress with the automation of systematic reviews: principles of the International Collaboration for the Automation of Systematic Reviews (ICASR). Syst Rev 7, 77 (2018). https://doi.org/10.1186/s13643-018-0740-7
  • Lise Gauthier, L’élaboration d’une méta-analyse : un processus complexe ! ; Pharmactuel, Vol.35 NO5. (2002) ; https://pharmactuel.com/index.php/pharmactuel/article/view/431
  • Nadia Soliman, Andrew S.C. Rice, Jan Vollert ; A practical guide to preclinical systematic review and meta-analysis; Pain September 2020, volume 161, Number 9, http://dx.doi.org/10.1097/j.pain.0000000000001974
  • Matthew Michelson, Katja Reuter, The significant cost of systematic reviews and meta-analyses: A call for greater involvement of machine learning to assess the promise of clinical trials, Contemporary Clinical Trials Communications, Volume 16, 2019, 100443, ISSN 2451-8654, https://doi.org/10.1016/j.conctc.2019.100443
  • Vance W. Berger, Sunny Y. Alperson, A general framework for the evaluation of clinical trial quality; Rev Recent Clin Trials. 2009 May ; 4(2): 79–88.
  • Une start-up spécialisée dans les méta-analyses augmentées par l’Intelligence Artificielle : https://www.silvi.ai/
  • Et enfin, la bible absolue de la méta-analyse : The handbook of research synthesis and meta-analysis, dirigé par Harris Cooper, Larry V. Hedges et Jefferey C. Valentine

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Recherche exploratoire

Données de santé : introduction à la révolution des données synthétiques

Les données, parfois considérées comme l’or noir du XXIème siècle, constituent effectivement le carburant indispensable des modèles d’intelligence artificielle, et sont déjà très largement utilisées par l’Industrie Pharmaceutique. Cependant, et notamment du fait du domaine particulièrement sensible de la santé, leur utilisation connaît plusieurs limitations. Les données synthétiques constitueront-elles l’une des solutions permettant la résolution de ces problèmes ?

Qu’est-ce que les données synthétiques et pourquoi les utiliser ?

Les données synthétiques sont des données créées artificiellement par l’utilisation d’algorithmes génératifs, plutôt que recueillies lors d’évènements réels. La technique a été initialement développée dans les années 90, afin de travailler sur les données du recensement américain sans divulguer les informations personnelles des répondants, tout en conservant des donnés de grande qualité et à grande échelle.

Ces données sont généralement fabriquées à partir de véritables données, issues par exemple des dossiers patients dans le cas des données de santé, et préservent les distributions statistiques de celles-ci. Ainsi, il est théoriquement possible de générer des cohortes de patients virtuels, n’ayant aucune identité réelle mais correspondant statistiquement en tous points aux cohortes réelles. Des chercheurs ont notamment réussi à synthétiser des dossiers patients virtuels à partir de données démographiques et épidémiologiques accessibles publiquement. Nous parlons alors dans ce cas de « fully synthetic data » par opposition aux « partially synthetic data » qui sont des données synthétiques fabriquées afin de, par exemple, remplacer les données manquantes de datasets recueillies classiquement.

***

Actuellement, et en dépit d’initiatives diverses et variées – comme le Health Data Hub en France, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir dans d’autres articles – visant à démocratiser leur usage, de nombreux problèmes limitent encore l’utilisation optimale et massive des données patient. Les données synthétiques sont l’une des solutions qu’il est possible de mettre en face afin d’y répondre.

  • La confidentialité des données de santé :

Naturellement, les données de santé sont particulièrement sensibles en matière de confidentialité. La préservation de l’anonymat des patients induit un certain nombre de problématiques d’accessibilité et de coût de traitement des données. De nombreux acteurs, telles les industries pharmaceutiques, peinent à obtenir ces données et lorsqu’ils réussissent à y accéder, leur traitement induit des dépenses réglementaires et de cyber sécurisation importantes. Les délais d’accès sont également souvent extrêmement longs, ce qui ralentit les projets de recherche. Dans le cas de certaines bases, il est parfois réglementairement imposé de s’offrir les services d’une entreprise tierce, accréditée à manipuler ces données.

Pour permettre leur utilisation, les données patient sont généralement anonymisées à l’aide de différentes méthodes : la suppression des variables identifiantes ; leur modification par ajout de bruit ou par le groupement des variables catégorielles, afin d’éviter que certaines catégories ne contiennent que trop peu d’individus. L’efficacité de ces méthodes a cependant été très régulièrement remise en question par des études montrant qu’il était possible de remonter à l’identité des patient, en effectuant notamment des appariements (probabilistes ou déterministes) avec d’autres bases de données. La génération de données synthétiques peut, dans ce contexte, être utilisée comme une alternative sûre et facile d’utilisation.

  • La qualité des données :

La technique de la génération des données synthétiques est couramment mise en œuvre afin de compléter des données manquantes dans des datasets de données réelles, qu’il est impossible ou très couteux de recueillir à nouveau. Ces nouvelles données sont représentatives de la distribution statistique de ces variables dans le dataset de données réelles, elles permettent d’améliorer la qualité des datasets et la pertinence des algorithmes qui les utilisent.

  • Le volume trop faible des datasets de données de santé pour pouvoir être exploité par intelligence artificielle :

L’entraînement des modèles de Machine ou Deep Learning requiert parfois de larges volumes de données afin d’obtenir des résultats de qualité satisfaisante : en effet, il est couramment accepté qu’il faut en général au minimum environ 10 fois plus d’exemples que de degrés de libertés du modèle. Or, lorsque l’on utilise le Machine Learning en santé, il est courant que le volume de données ne permette pas la mise en production et l’obtention de résultats de qualité satisfaisante, dans le cas par exemple de pathologies rares peu documentées, ou de sous-populations représentant peu d’individus. L’utilisation de données synthétiques fait partie, dans ce cas de figure, de l’arsenal technique à la disposition des data scientists.

L’utilisation de données synthétiques constitue un champ industriel naissant, dont certains spécialistes pensent qu’il prendra part à dépasser certaines limites actuelles de l’IA. Parmi les différents avantages apportés par les données synthétiques dans le champ de l’IA, nous pouvons notamment citer : le fait qu’il est rapide et peu coûteux de créer autant de données que l’on souhaite, sans avoir besoin de les étiqueter à la main comme cela est souvent le cas pour les données réelles, mais aussi que ces données peuvent être modifiées à plusieurs reprises afin de rendre le modèle le plus efficace possible dans son traitement de données réelles.

Les techniques de génération de données synthétiques

La génération des données synthétiques implique plusieurs phases :

  • La préparation des données de l’échantillon à partir duquel, le cas échéant, les données synthétiques seront générées : afin d’obtenir un résultat de qualité, il est nécessaire de nettoyer et d’harmoniser les données si elles proviennent de sources différentes
  • La génération à proprement parler des données synthétiques, dont nous allons détailler ci-dessous certaines techniques
  • La vérification et l’évaluation de la protection de la confidentialité offerte par les données synthétiques

Figure 1 – Schéma de génération de données synthétiques

Les méthodes de génération de données sont nombreuses et le choix de leur utilisation dépend notamment de l’objectif, du type de données que nous souhaitons créer ainsi que du contexte : faut-il créer des données à partir de données déjà existantes et ainsi suivre leurs distributions statistiques ? Ou des données pleinement virtuelles suivant des règles leur permettant d’être réalistes (comme du texte par exemple) ? Dans le cas des méthodes « data driven », on tire profit de données existantes : des modèles génératifs de Deep Learning seront utilisés. Dans le cas des méthodes « process-driven », permettant notamment à des modèles mathématiques de générer des données à partir de processus physiques sous-jacents, il s’agira de ce que l’on appelle des modélisations à base d’agents.

De manière plus opérationnelle, les données synthétiques sont généralement créées en langage Python – très connu des Data Scientists. Différentes librairies Python sont utilisées, comme : Scikit-Learn, SymPy, Pydbgen et VirtualDataLab. Un prochain article de Resolving Pharma fera suite à cette introduction en présentant techniquement comment créer des données de santé synthétiques à l’aide de ces librairies.

***
L’évaluation des données synthétiques

Il est courant d’évaluer les données patient anonymisées selon deux critères principaux : d’une part la qualité de l’utilisation qu’il est possible d’en faire, et d’autre part la qualité de la confidentialité que l’anonymisation a permis d’obtenir. Il a été démontré que plus des données étaient correctement anonymisées et plus l’utilisation possible était limitée, puisque des features importantes mais identifiantes sont supprimées ou que l’on perd en précision en regroupant des classes de valeurs. Il y a donc un équilibre à trouver entre les deux, en fonction de la destination des données.

Les données synthétiques sont quant à elles évaluées selon trois critères principaux :

  • La fidélité des données par rapport à l’échantillon de base
  • La fidélité des données par rapport à la distribution de la population générale
  • Le niveau de confidentialité permis par ces données.

Différentes méthodes et métriques existent pour évaluer ces critères :  

En permettant de s’assurer que la qualité des données générées est suffisante pour l’utilisation qui doit en être faite, l’évaluation est un élément indispensable et central du processus de génération de données synthétiques.

Les données synthétiques, quels cas d’usage pour l’industrie pharmaceutique ?

Il y a quelques mois, les entreprises Accenture Life Sciences et Phesi, deux sociétés de services aux entreprises pharmaceutiques, ont corédigé un rapport enjoignant ces dernières à intégrer davantage les données synthétiques à leurs activités. Le cas d’usage mentionné dans ce rapport est celui des bras de contrôle synthétiques qui pourtant utilise généralement des données réelles, issues de différents essais cliniques et retravaillés statistiquement.

En dehors des frontières de l’industrie pharmaceutique, dans le monde de la santé, les données synthétiques sont déjà utilisées afin d’entraîner des modèles de reconnaissance visuelle, en imagerie notamment : les chercheurs peuvent ajouter de manière artificielle des pathologies sur des clichés de patients sains et donc de tester leurs algorithmes sur leurs capacités à détecter ces pathologies. Sur le modèle de ce use-case, il est aussi possible de créer des données de coupes histologiques qui pourraient servir à entraîner des modèles d’IA en préclinique.

***

A n’en pas douter, l’industrie bourgeonnante des données synthétiques est bien partie pour bousculer l’intelligence artificielle telle que nous la connaissons actuellement et son utilisation dans l’industrie de la santé qui a la particularité de manipuler des données sensibles et difficilement accessibles. Nous pouvons imaginer par exemple un écosystème où il sera plus facile et efficace pour les industriels de créer leurs propres données synthétiques, que de chercher à avoir accès aux bases de données médicales ou médico-administratives. Cette technologie serait alors l’une de celles qui modifieraient l’organisation de l’innovation dans les industries de santé, en offrant une place moins centrale aux données réelles.


Pour aller plus loin :

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Entrepreneuriat Généralités

Blockchain, Applications mobiles : la technologie permettra-t-elle de résoudre le problème des médicaments contrefaits ?

« Fighting counterfeits drugs is only the start of what blockchain could achieve through creating [pharmaceutical] ‘digital trust’.»

Andreas Schindler, Blockchain Expert

20% des médicaments en circulation dans le monde sont des médicaments contrefaits, dont la plupart ne contiennent pas la bonne substance active ou pas en bonne quantité. Représentant 200 milliards de dollars par an, ce trafic – 10 à 20 fois plus rémunérateur pour le crime organisé que celui de l’héroïne – cause chaque année la mort des centaines de milliers de personnes dont une majorité d’enfants que leurs parents pensent soigner avec de véritables médicaments. Pour lutter contre ce fléau, laboratoires et autorités sanitaires internationales doivent présenter un front uni, dont la technologie pourrait être la clef de voute.

***
Le problème de la contrefaçon de médicaments

C’est un fléau quasiment invisible, dont il est difficile de définir les contours, une épidémie mondiale à bas bruit, qui ne provoque ni confinements ni campagnes massives de vaccinations mais qui pourtant tue chaque année des centaines de milliers de patients. Les médicaments contrefaits, définis par l’OMS comme étant « des médicaments fabriqués de manière frauduleuse, mal étiquetés, de mauvaise qualité, dissimulant le détail ou l’identité de la source et ne respectant pas les normes définies », concernent généralement des maladies graves comme le sida, la tuberculose ou le paludisme et conduisent notamment au décès d’environ 300 000 enfants de moins de 5 ans atteints de pneumonie et de paludisme. Dans les faits, l’appellation généraliste « médicaments contrefaits » regroupe des produits très différents : certains ne contenant aucun principe actif, d’autres renfermant des principes actifs différents de ce qui est indiqué sur leur étiquetage, d’autres encore contenant le principe actif indiqué en quantité différente. En plus de leur responsabilité dans ces innombrables drames humains du présent, les médicaments contrefaits participent également à ceux de demain en participant notamment à l’augmentation de l’antibiorésistance dans des zones du monde où les systèmes de santé sont déjà défaillants et ne seront probablement pas en mesure de faire face à l’avenir à ce nouveau défi.

Parlons désormais d’argent. En dehors de ces considérations de santé publique, les médicaments contrefaits sont également un problème économicopolitique pour les états : ce trafic représentant 200 milliards de dollars par an permet d’une part d’alimenter d’autres filières du crime organisé et représente d’autre part un coût très important pour les systèmes de santé. Concernant les industries pharmaceutiques, les problématiques causées par ce trafic sont également nombreuses : un manque à gagner représentant 20% de leurs ventes mondiales ; un immense déficit de confiance des patients – ne sachant pas la plupart du temps que les médicaments contrefaits ne sont pas les originaux ; et enfin des dépenses considérables afin de lutter contre les contrefaçons.

***
Les initiatives pour contrer les contrefaçons de médicaments

Les médicaments contrefaits sont généralement distribués à travers des réseaux extrêmement complexes, ce qui rend particulièrement difficile la lutte pour endiguer leur propagation. Dans son « Guide pour l’élaboration de mesures visant à éliminer les médicaments contrefaits », l’OMS identifie différentes initiatives juridico-socio-politiques pouvant être mises en place pour les Etats afin de limiter la propagation de ces médicaments contrefaits, ces recommandations certes pertinentes sont particulièrement difficiles à mettre en place dans des régions du globe dans lesquelles les Etats ont peu de moyens et dont les structures sont gangrénées par la corruption endémique. Dans cet article, nous nous intéresserons par conséquent davantage aux solutions mises en place par des entreprises privées : start-ups spécialisées dans la lutte contre les médicaments contrefaits ou grandes entreprises pharmaceutiques.

L’une des pistes suivies par différentes start-up, notamment PharmaSecure, basée en Inde, ou Sproxil, basée au Nigéria et collaborant activement avec le gouvernement de ce pays, est d’utiliser le très large accès au smartphone des populations de ces pays pour leur permettre d’identifier les boîtes de médicaments contrefaites selon le modèle suivant : les fabricants de médicaments collaborent avec ces start-ups afin de mettre en place des codes (sous forme numérique ou de QR codes) dissimulées à l’intérieur des boîtes ou sur l’emballage du médicament, sous une surface à gratter ou décoller. Le patient peut télécharger gratuitement une application et y scanner ces codes pour vérifier que ses médicaments sont authentiques. Ces applications permettent en-sus aux patients de bénéficier de conseils relatifs à leurs traitements. Elles tiennent le rôle, dans leur fonctionnement, d’un tiers de confiance permettant de certifier au patient, consommateur final du médicament, que personne ne s’est substitué frauduleusement au fabricant légitime.

Figure 1 – Modèle de fonctionnement des applications mobiles de vérification de l’authenticité des médicaments

Le système décrit ci-dessus fonctionne globalement de la même manière que la sérialisation dont la mise en place a commencé il y a plusieurs années et est décrite dans le règlement européen 2016/61 ; à l’exception du fait que la vérification est réalisée par le patient et pas par le pharmacien.

D’autres applications mobiles, comme CheckFake et DrugSafe, développent un système de vérification différent, tirant profit de la caméra du smartphone pour vérifier la conformité en matière de formes, de contenus et de couleurs des packaging des médicaments. Enfin, une autre catégorie d’applications, mettent en place un système permettant d’analyser la forme et la couleur des médicaments eux-mêmes de manière à identifier de quels comprimés il s’agit et s’ils sont authentiques.

Ces différentes solutions présentent un certain nombre de qualités, en particularité leur facilité de déploiement et d’utilisation par les patients dans tous les pays du monde. En revanche, elles présentent l’inconvénient d’être lancées dans une course de vitesse avec les contrefacteurs poussés à produire des contrefaçons de plus en plus réalistes et ressemblantes. Par ailleurs, elles sont difficilement applicables pour aller plus loin : sécuriser la totalité des chaînes d’approvisionnement ou encore tracker le circuit des médicaments dans les hôpitaux, c’est la raison pour laquelle de nombreux grands groupes pharmaceutiques, comme Merck ou Novartis par exemple, misent depuis quelques temps déjà sur une technologie différente : la Blockchain. Explications.

***
Présentation succincte de la technologie Blockchain –

La Blockchain est une technologie conçue en 2008, sur laquelle se sont construites les crypto monnaies depuis cette date. Il s’agit d’une technologie sécurisée par cryptographie de stockage et de transmission d’informations sans organe de contrôle centralisé. L’objectif principal est de permettre à un protocole informatique d’être un vecteur de confiance entre différents acteurs sans tiers intermédié. Le mécanisme de la Blockchain permet aux différents acteurs qui y participent d’obtenir un accord unanime sur le contenu des données et d’éviter leur falsification ultérieure. Ainsi, la méthode historique de consensus entre les acteurs est celle dite de la « preuve de travail » : un certain nombre d’acteurs fournissent de la puissance de calcul afin de valider l’arrivée de nouvelles informations. Dans le cadre des cryptomonnaies, ces acteurs sont appelés les mineurs : des machines informatiques très puissantes et aux dépenses énergétiques importantes reçoivent toutes en même temps un problème mathématique complexe à résoudre, la première qui réussira sera en mesure de valider la transaction et d’être rémunérée pour cela. Chacun des participants, appelés « nœuds », possède par conséquent un historique mis à jour du grand livre de compte qu’est la Blockchain. Dans les faits, cette attaque est peu envisageable, sur des blockchains comme celles du Bitcoin par exemple, tant la puissance de calcul à développer serait phénoménale (peut-être qu’un jour l’ordinateur quantique rendra-t-il obsolète ce que nous considérons actuellement comme de la cryptographie, mais c’est un autre débat…) D’autres techniques de validation existent désormais, comme la preuve de participation ou encore la preuve de stockage. Elles ont essentiellement été conçues afin de répondre aux problématiques de scalabilité et de durabilité énergétique des blockchains.

Figure 2 – Schéma de l’ajout d’un bloc à une blockchain

Conçue à la suite de la crise financière de 2008, cette technologie a une forte connotation politique, et le Bitcoin a par exemple pour philosophie de permettre un affranchissement des individus envers les systèmes de contrôle bancaire et politique. Ainsi, les blockchains originelles, comme celle du Bitcoin, sont dites « ouvertes » : chacun peut lire et écrire les registres de la chaîne. Avec le temps, et pour davantage de praticité par des entreprises privées, des blockchains semi-fermées (tout le monde peut lire mais seul un organisme centralisateur peut écrire) ou fermées (la lecture et l’écriture sont réservées à un organisme centralisateur) ont été développées. Ces nouvelles formes de blockchains s’éloignent considérablement de la philosophie de départ, et l’on peut légitimement interroger leur pertinence : elles présentent certains inconvénients de la blockchain en termes de difficulté d’utilisation tout en conservant également les problématiques liées à une base de données centralisées : une seule entité peut décider volontairement de la corrompre ou souffrir d’un piratage. Cette configuration fermée permet souvent une plus grande scalabilité mais pose une question autant technologique que philosophique : une blockchain, lorsqu’elle est pleinement centralisée, en est-elle encore une ?

***
Perspectives d’utilisation de la technologie Blockchain dans la lutte contre les médicaments contrefaits

A l’heure où la confiance est plus que jamais une problématique centrale de l’industrie pharmaceutique, qui voit sa légitimité et son honnêteté questionnées sans répit, il est logique que les acteurs de ce secteur s’intéressent à la technologie de la confiance par excellence. Parmi les différents cas d’usage possibles, sur lesquels nous pourrons sans doute revenir lors de prochains articles, la lutte contre les médicaments contrefaits est l’un des plus prometteurs et des plus importants en termes de vies humaines potentiellement sauvées. Ainsi, Merck a récemment commencé à collaborer avec Walmart, IBM et KPMG dans le cadre d’un projet pilote porté par la FDA afin d’utiliser la blockchain pour permettre aux patients de tracker la totalité du circuit du médicament qu’ils ont entre les mains. Ce concept est déjà mis à l’étude de manière fonctionnelle à Hong Kong à propos du Gardasil et à l’aide d’applications mobiles téléchargées par les pharmaciens et les patients. Ainsi, toute la chaîne d’approvisionnement du médicament est bâtie autour de la blockchain permettant de récupérer et d’assembler un grand nombre de données concernant par exemple les dates d’expédition ou encore les conditions et températures de conservation. Le consortium précédemment cité explore également l’utilisation de Non-Fungible Tokens (NFT) : des jetons numériques uniques et non interchangeable. A chaque boîte de médicament produite serait associé un NFT, qui suivrait la boîte dans son circuit, du fabricant au grossiste, du grossiste au pharmacien et du pharmacien au patient, par exemple. Ainsi, chaque patient recevrait dans le futur un NFT en même temps que sa boîte de médicaments afin d’en certifier l’inviolabilité de la provenance. Aucun des acteurs de la chaîne d’approvisionnement ne pourrait prendre la liberté d’ajouter frauduleusement des médicaments contrefaits puisque ces derniers ne posséderaient pas leur NFT associé. Cette vision du futur est probablement réjouissante et en faveur d’une sécurité accrue du médicament, mais elle ne sera réalisable qu’après un travail important, d’une part d’éducation des parties prenantes et d’autre part de mise en place d’interfaces digitales accessibles à tous les patients.

***

Avec l’émergence du e-commerce et de sa facilité d’accès toujours plus importante, le problème des médicaments contrefaits a explosé ces dernières années et il sera nécessaire que les différents acteurs de l’écosystème pharmaceutique se mobilisent et se montrent créatifs pour l’endiguer, ainsi que pour restaurer la confiance détériorée. Plusieurs initiatives extrêmement intéressantes utilisant la technologie de la blockchain sont actuellement portées par différents acteurs du secteur de la santé, nous pouvons voir dans ces projets l’esquisse d’une potentielle solution à la contrefaçon des médicaments, mais nous devons toutefois les considérer avec un certain esprit critique tant la tentation de faire du marketing autour du buzz-word que représente la blockchain depuis l’explosion des crypto-monnaies en 2017 peut être forte – et même, malheureusement, lorsque les problématiques pourraient parfaitement se satisfaire d’une base de données centralisée. Pouvons-nous aller jusqu’à penser comme certains spécialistes de cette technologie que la blockchain n’est viable et utile que lorsqu’elle est utilisée pour des transferts financiers ? Le débat est ouvert et nul doute que le futur y apportera rapidement une réponse !

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